Après la réédition de son mythique Cold Tears, pierre angulaire d’un rock d’en France auquel il fit un bien fou, le plus que regretté Dominic Sonic nous fait don d’ Acoustic, où figurent des versions retravaillées de onze de ses morceaux. Un disque auquel le grand Dom’ s’est affairé de son vivant, conviant pour ses besoins quelques invités proches de lui, et pas des moindres. Un lingot que Les leurres, « superbisé » entre autres par le violon de la magnifique Mirabelle Gilis, par ailleurs très présente sur le recueil, inaugure de manière pimpante. Débarrassé de son électricité, le morceau garde, intacte, sa magie. Le rennais d’origine, ayant toujours pensé qu’un bon morceau pouvait se jouer acoustique, crédite d’emblée son propos.
C’est un second souffle que vont trouver, magistralement relues, ses compositions. Pas que ça le démontre, brillant d’un éclat « Acoustic folk » pur et sincère, qui plus est entrainant. Le fidèle Romain Baousson, qui fait partie du « backing band » de Dominic, y intervient en plus d’avoir, on l’en loue, enregistré le tout. La folle de Saint Lunaire, splendidissime, le voit s’illustrer avec, dans une énergie gouailleuse, Sanseverino au micro, d’une voix rocailleuse à la Arno, typée, et Dabiel Paboeuf au saxophone. Entre autres participants de choix, puisque dans le proche clan de Dominic figurent aussi Thomas Schaettel, Jacques Auvergne et l’éternel Franck Hamel. Des valeureux, solides hommes de main de la légende qui trousse ensuite un Rootless nation où seule Mirabelle l’accompagne.
L’écrin est épuré, serti avec brio par la Dame. Avec Miracles c’est Mona Soyoc, ni plus ni moins, qui prête son organe singulier et chaleureux au morceau, doté d’une dynamique qui en rappelle l’original. On navigue, sur Acoustic, de splendeur en splendeur. Dominic me disait, en interview, qu’il ne se lassait pas d’entendre les violons de Mirabelle. On ne peut que le comprendre: ils brillent de milles cordes mais soulignons néanmoins, et tout autant, la présence d’un Didier Wampas qui encanaille La loi des pauvres gens. Une chanson, une fois de plus, aux airs de standard « à la Sonic ». Il est dur d’écrire, d’écouter tout ça, sans que les larmes poignent. Et que dire de Mon ange…poignant, justement, mais aussi nerveux, « Mirabellisé » dans un fougueuse beauté. Dominic s’y livre, chantant comme à ses plus belles heures. Fuel, avec l’appui d’une certaine et magnifique Laetitia Shériff, fait gicler une acoustique belliqueuse. La dualité des voix est magique, le contrepoint masculin/féminin de marque. L’ornement, comme toujours, au zénith de l’élégance. Quel plus beau cadeau, de la part de Dominic et sa team élargie, que ce Acoustic à jouer fort, sans modération, à toute heure de nos heures.
Song of Mr Charles, où Dominic assure tout, suinte le don de soi. A nu, armé d’un harmonica et de sa guitare acoustique, ce grand monsieur fait merveille. Puis il s’acoquine, sur What I’m waiting for, avec deux autres guests prestigieux. Ces derniers ont pour nom Olivier Mellano, à la guitare acoustique, et Mike Watt à la basse. Ca groove juste, subtil et dansant, alerte aussi. En s’employant à peaufiner Acoustic, Dominic se préparait à nous léguer un disque noble et admirable, collaboratif et, dans le même temps, oh combien personnel. En toute modestie, avec passion et investissement.
Quant à son talent, on ne le décrit plus; on l’écoute, des centaines, des milliers de fois car ses disques, sans égal, font foi. L’intense Back to the sad times, à l’heure de finir, marie finesse de l’acoustique, violon bien trop beau, grinçant aussi, et texte comme de coutume poétique, humain, profond. Dom’ a du coeur, en plus d’être doué et vertueux. J’en veux pour preuve ces onze perles dont je m’enivre, après m’être dopé ce matin au Delgado Jones, jusqu’à l’ivresse musicale. Une griserie, une biture saine, salvatrice, fortement émotionnelle, née de la source Sonic dont coule depuis la fin des 80’s le meilleur des breuvages sonores.