Depuis A mysterious land of happiness…, sorti en novembre 2020, le Broken Waltz de Clément Palant et Xavier Soulabail « without any guitar » est bien loin d’avoir chômé. …And disasters vient en effet compléter, porté par des trames poisseuses et agitées-déglinguées à la Nick Cave, une discographie certes naissante mais qui promet. Dans la pénombre, les protégés de Beast Records assènent d’abord A dream worth living for, vrillé, cinglé, pété du bulbe. De partout, fusent des sons de déjante qu’appuie un saxo déchiré. On s’en remet à peine que se présente Deep in the mud, un brin Tom Waits avec une pincée de Suicide. On l’aura compris, …And disasters nous laissera peu de répit. Il entérine, de ses vocaux déviants et viciés, de ses canevas qui ne filent pas droit, le savoir-faire de Broken Waltz. Amateurs d’ élans joyeux, passez votre tour. C’est dans l’obscur, dans sa sphère favorite, que vous attire Broken Waltz. Hypocrite-part III, bref mais groovy, aurait mérité de s’étendre.
A sa suite Bloody painters, lent, se donne des airs de Cohen. Il s’envole, avec classe et dans le soufre. Voilà un album de choix, bien ouvragé, qui ne plie pas. Shall we let them off the hook, vêtu de noirceur, oscille sous l’effet de sa batterie. Ses sons canailles le décorent, sa lancinance le rend d’autant plus marquant. On termine alors la face A, pour se fader ce White gown swamp et marécageux, pas plus alerte. Broken Waltz, en paire batterie-chant + basse et sonorités assombries, ne charge pas la mule et fera, à coup sûr, des émules. Come down off the cross, à l’enragement progressif, n’aurait pas dépareillé chez Grinderman. …And disasters, sur fond d’histoires glauques, élargira l’auditoire de ses géniteurs. Crocodiles & flies, d’un boogie fulgurant, montre les crocs et ne laisse plus planer le moindre doute quant à l’accomplissement du méfait. Hypocrite-part IV, aussi bref que sa première mouture, aurait lui aussi mérité de se développer.
Photo Vincent Paulic.
Il s’en passe, ce n’est rien; Christmas boiler suit sans faillir. Le clapet est refermé, mais les chants embellissent le gris que projette Broken Waltz. L’éponyme And disasters, pour finir, marie secousses électroïdes et vocaux psyché, enveloppés d’une brume narrative, histoire de ne pas boucler l’opus dans le normalité. Si l’on reconnait, ça et là, quelques sources évidentes, force est de reconnaitre que Broken Waltz, par la formule imposée et la valeur régulière de son répertoire, poursuit sa route sur une très bonne note. Sa galette sort de plus chez Beast Records, où on s’affaire à recenser des formations aussi méritantes et « marginales » que peut l’être le duo Palant/Soulabail.