En prélude à la sortie de « Partout en France », leur nouvel EP hébergé par SOZA / Collectif 5024, les deux normands « géniobordéliques » de Modern Men répondent aux questions de Will Dum et nous éclairent sur l’univers de leur projet…
1) Fin 2019, vous prétendiez « Anéantir le monde moderne ». Où en êtes-vous de cette audacieuse entreprise et comment vous y prenez-vous pour la mener à bien ?
Le dossier est classé ; ca serait mentir de prétendre avoir été les seuls à participer à son anéantissement, mais on est plutôt fiers du résultat.
2) Comment s’est formé votre duo et pourquoi? Quel est l’apport de vos parcours respectifs à l’identité de Modern Men ?
Alors le duo s’est formé naturellement, on est potes depuis longtemps. On voulait expérimenter des choses, construire de la musique à partir de ces expérimentations plutôt qu’autour d’une mélodie par exemple. Moi ( Quentin) je mets toujours beaucoup de ma personne dans mes projets, c’est ce que j’ai le plus à apporter : le coté impulsif, abrasif, un poil déconneur .
Pour Adrian, on est plus sur de la recherche sonore, aller défricher des zones qu’on ne connaît pas du tout et se les approprier, en tout cas essayer.
3) Si je vous dis que Modern Men, prétendument moderne donc, puise dans le vieux pour créer du neuf, donc du moderne en quelque sorte, qu’en pensez-vous ?
Il est clair que l’adjectif moderne est sûrement un des plus ridicules qui puisse être. C’est une étiquette qu’on va coller à n’importe quoi, par exemple un aspirateur, pour t’expliquer que c’est de la merde. Selon moi, si un truc est qualifié de moderne, ca veut déjà dire qu’il est dépassé. Et pour revenir sur MM, comme on l’a déjà dit auparavant, c’est plus un hommage total/demi-plagiat à des trucs qu’on aime bien qu’une volonté de créer quelque chose de nouveau.
De toute manière on fait de la musique populaire, ca doit rappeler aux gens des trucs qu’ils connaissent déjà. Ca peut sembler « recherché », même « novateur » pour certains mais c’est juste parce que c’est un peu le bordel et que le mélange est parfois indigeste. En tout cas c’est faux, pas de réelle innovation à l’horizon!
4) Où en êtes-vous de vos sorties discographiques ? Comment ont-elles été accueillies ? Votre nouvel EP, Partout en France, sort le 15 octobre prochain. A l’écoute j’ai l’impression, tenace, qu’il marque une évolution dans le son de votre duo . Vous confirmez ? Vous semblez, par ailleurs, être dans le refus délibéré d’un format « figé »….
Comme je disais avant, c’est le bordel donc effectivement, si on veut formuler ça de manière un peu plus classe, on peut dire « refus délibéré d’un format figé » 🙂
Pour revenir sur comment nos sorties sont accueillies, on sort un peu tout et n’importe quoi ! Du coup les gens ne comprennent pas trop. On a sorti un album de drone dans un boitier VHS, pendant l’été, qui est la bande originale d’un film imaginaire. Personne ne l’a écouté et personne n’a compris le principe autour mais en tout cas, on a appris plein de choses en le réalisant ! C’était une collaboration avec plein de gens, c’était top. Pour la suite, on va quand même essayer de ranger nos affaires dans nos têtes et sortir un véritable premier album en faisant un minimum d’efforts sur la cohérence.
5) Comment s’est passé l’enregistrement de l’ep ? Y’a t-il des gens, sur Rouen ou alentours, avec lesquels vous travaillez ou collaborez de manière régulière?
Non on fait ca tous les 2, du coup ca se passe bien. Après on expérimente beaucoup : le premier morceau de l’EP s’appelle 2019, on l’a commencé en 2018. J’avais anticipé le nom pour qu’il soit dans l’actualité et il sort fin 2021, ca peut te donner une idée du chaos intersidéral dans lequel on compose la musique, à base de « recommencer du début tous les 6 mois et prendre 3 ans pour finir une chanson ».
6) Partout en France, c’est là que vous souhaitez être ? J’entends par là, connus dans tous les recoins de l’hexagone…mais reconnus par la frange indé de celui-ci.
C’est sûr qu’on n’a pas beaucoup tourné avec ce projet et qu’on aimerait bien présenter nos chansons ailleurs que dans les salles parisiennes qu’on arpente pas mal, même un peu trop d’ailleurs.
Après si on fait référence au « Partout en France » de l’EP, ce qui se ressent partout en France ce sont les pires travers de notre société, conséquence directe de l’anéantissement du monde moderne: c’est un peu chaotique mais aussi assez fascinant, on ne sait pas si c’est là qu’on aimerait être mais on n’a pas trop le choix.
7) Votre projet est-il prétexte à dénoncer, à mettre l’accent sur ce qui dérange ou interpelle ?
C’est clairement un regard sur la France actuelle, mais ça me semble plus proche d’une photo que d’un article de presse. On laisse les gens interpréter ce qu’ils entendent, même si évidemment il y a une certaine couleur politique qui imbibe tout ça.
8) Comment avez-vous vécu la reprise de l’activité live ?
C’était pas mal raide au début, on va pas te mentir ! Mais ca y est, on commence à reprendre nos repères et ca fait plaisir.
9) Que prévoyez-vous, suite à la sortie de l’ep, pour le défendre ?
Prévoir des choses, c’est pas trop dans nos caractères. Mais vu que les concerts reprennent et qu’on sort un nouveau truc, j’imagine qu’on va faire pas mal de concerts et jouer en boucle ces chansons jusqu’à ne plus les supporter!
Photos Félix Ramaën.