Chafouin, t’en feras jamais tout un foin. Trop modestes, trop discrets pour ça, les brestois. A géométrie variable, parait-il, il y a chez eux une chose qui ne varie pourtant pas d’une note: leur qualité. Leur aptitude, en plus de ça, à s’en aller chercher des sentiers tordus, qui retombent sur leurs pattes. Mais Toufoulcan, t’façon. Alors pour y remédier, Lolot, Zézé, Marius et L’ostral (on est pas sorti des ronces..) nous refourguent douze titres superbement bancals, mélodiques parfois mais pas trop tenus en laisse non plus. Leur Toufoulcan sort sur 14000 labels, comme quoi y’a quand même pas mal de monde qui aime à propager c’te zik-là. Et ça, va falloir s’en réjouir car ça vaut bien plus que de se caler maitre Gim’s et ses inepties d’amputé du ciboulot. Bref, c’est Pas trop vite qui le premier, retire son slip. Pas trop vite en effet, il ose ses notes parcimonieusement. Presque post, mais tout de même bien vivant, il s’approche de l’implosion…mais non.
Une première banderille est plantée, Piano assis prend le relais en se faisant vaguement jazzy…et tranchant dans ses riffs. Ah oui on vous l’avait pas dit, ou plutôt si, je ne sais plus: Chafouin ne se restreint que peu. Ici il pose sa voix, mélodique, sur un rock joueur et bellot. V’là t’y pas qu’on aime, bon y sont de Brest (déjà dit aussi?) et c’est loin d’être mauvais signe. Des bras pulse, ses sons grondent. On croirait Gablé, par moments, même s’ils le font pas pour le blé. Là encore, ça signifie que Chafouin, ça se prend sans gueuler, même sur ses instrus quand y refusent de pousser la chansonnette.
Allez, on prendra bien une gorgée de Dire ouf. Greg Saunier et consorts ne désapprouveraient pas: le morceau est aussi libre et aventureux que ce qu’ils sont habitués à produire. Pop, mais excentrique. Ca file la trique, oh pardon les bienséants! Déterre, après ça, impose ses secousses où des fois, t’as la sensation d’entendre du math. Mais c’en est pas, c’est Chafouin et ça r’ssemble à rien. C’est pour ça qu’on aime autant, même si Toufoulcan. Nous, on reste en place à auditionner ce bazar/bric-à-brac qui casse la baraque. Il est rude et poppy, ce Déterre. Il groove, comme tout le disque. This eat, chargé de lui donner suite, retient sa force. Dans le bridé, Chafouin n’est pas si mal non plus. Oh c’est cool, ça s’emballe et moi avec! On a droit, comme souvent, à des sons bien trop bons. Ca chante pas, là non plus, mais ça reste de choix. Le bordel vire noisy, puis il stoppe sa course. Faut pas déconner, courir ça fatigue! Alors on retombe, avec grâce, sur En silence. On gazouille à nouveau, et c’est beau.
On place tout d’même, polisson, quelques ruades. P+++++ de bordel, j’adore! J’enverrai mon article à Araki, comme ça y m’enverront des disques et j’emmerderai tout l’monde avec. Pour l’instant c’est Paindemie, du vrai pain d’épice ce truc-là, qui pose sa pop appuyée. Avec du rock, distordu, dedans. Des vrais morceaux, pas de l’édulcoré. Le délire se poursuit, s’accentue même, avec l’arrivée de l’alerte La foire d’empoigne. Une pop-rock jubilatoire, gorgée de sons et de paroles « in French » qui font tripper. Juste trop bon! Ca se met à tracer, mais grave! C’est bien foutu, bien décoré, bien joué comme tout skeud de Chafouin. Qui se marre, sur le dit titre, et affiche une mine forcément sournoise. Post post rock, histoire de ne pas redresser la barre, s’amuse à se répéter. Post oui, mais quand même turbulent, un peu. Et magnifique. Mazette, y se sont pas foirés là non plus! Les fous, à la fin ou pas loin, file lui aussi, mélodieux mais aussi griffu. Il breake, de tout son poids, en vrillant grave.
Il est alors l’heure (j’ai regardé ma montre), ou pratiquement, de tirer la révérence. Sans révérence, justement, Tout casser riffe lourd, se fait presque psyché mais de manière sonique. Son chant l’adoucit, ses sonorités couinent. Ca dévie, normal attends! C’est Chafouin, pas Indochine non plus! Résolument indé, les Bretons assurent et envoient valser toute idée de normalité, le long de douze perles changeantes dans leurs humeurs. Toufoulcan est impeccable, il ravira l’amateur de zik qui cherche sa route et finit par la trouver, à peu près. J’en ai fini, je refile illico le truc à Araki, comme prévu. Et j’attends, impatiemment, l’enveloppe avec les dernières sorties qui m’aideront à me fâcher de manière définitive avec mes voisins qui écoutent le sublimissime Joe Dassin.