Connu en tant que leader de la figure indé qu’est Superchunk, Mac McCaughan a mis son temps libre à profit, début 2021, après avoir conçu une musique de film et divers travaux musicaux. Son activité lui a permis de « breaker » la routine, de faire varier son approche aussi. Là où, en effet, la guitare servait de base aux créations de Superchunk, ici un loop, ailleurs un instrumental dictent le climat de l’opus ainsi façonné. Des titres pouvant évoquer la trilogie Bowie se glissent dans le disque, qui varie magiquement entre ces ambiances, donc, et des milieux plus pop de belle facture (un superbe Circling Around). De nombreux invités sont présents -on sait le bonhomme inspiré par le travail de ses congénères- et au final, ça nous donne un album de tout premier ordre, divers sans trop se découdre. Moss Light pose, pour débuter, un trip céleste. Il ondule, s’élève dans les cieux, puis le titre éponyme se fait, lui, également atmosphérique mais chanté, plus animé, dans une superbe finesse. Sensibilité dans la voix, étoffe joliette font la différence. Suit I Hear a Radio, dans une fougue plus prononcée, qui tutoie l’excellence d’un Superchunk dans une veine plus poppy. Entre mélodies et énergie, il s’impose sans avoir à forcer le trait.
A sa suite, 36 and Rain réinjecte du spatial, sobre, dans l’effort de Mac McCaughan. Ca peut désorienter, il n’empêche que le rendu s’avère être assez prenant pour qu’on en poursuive l’exploration. Burn a Fax, dans une électro-pop que Matt Douglas décore de son sax alors que Mackenzie Scott y dépose un chant volant, s’illustre. C’est non seulement beau, mais aussi apaisant et bien ficelé. The Sound of Yourself fait partie de ces disques qui, au fil de l’écoute, raflent l’adhésion. Gen Ash le voit, derechef, flirter avec le zénith, flotter, donner vie à une ambient subtile. Puis vient le sublime Circling Around nommé plus haut. R Dream renoue, après cela, avec un climat céleste. D’aucuns auront décroché, pourtant les textures déployées valent largement qu’on s’y attarde. Le ressortissant de chez Merge Records est aussi doué que bien entouré, Sleep Donor l’amène à une pop de classe, doucereuse/acidulée, magnifiquement sertie, en compagnie de Sabrina Ellis.
Dans la foulée et pour valider l’ensemble, tenu, Dawn Bends patine ses mélopées tout en affichant de l’allant. Pop-folk, vivace, fait de ritournelles de qualité, il consolide The Sound of Yourself et fait reluire son décor. On n’est certes pas chez Superchunk , dans un registre rock offensif. Mais la nouveauté impulsée par McCaughan est notable, concoctée avec une dose de savoir-faire que beaucoup lui envieront. Les guitares se font mordantes, souillées: en cela elles rappellent le groupe d’appartenance du bonhomme. Qui, ici, étale des dispositions qu’on ne cherchera pas à lui discuter. Found Cricket, en toute fin de parcours, conclut sur des tonalités une fois de plus aériennes, dont la répétition confère à l’hypnose. Le tour est joué, The Sound of Yourself permet à l’artiste de se distinguer dans un domaine différent de son terrain de jeu habituel ou qui, plutôt, synthétise les tendances abordées au cours de sa carrière.
Le résultat, bien évidemment, en tire profit. Il importe de rester en phase: The Sound of Yourself est assez immersif, exigeant parfois, varié aussi. Il faut donc du temps, de l’attention, des écoutes suffisamment nombreuses et impliquées pour bien l’appréhender. Au bout de l’effort, on tient un opus qualitatif, personnel et collaboratif, qui honore le musicien de Chapel Hill et entérine son choix d’oeuvrer de pair avec une ribambelle de guests aux interventions probantes.