Les Australiens de Pond, qui partage des membres avec Tame Impala (ça m’en fait une belle..), en arrivent avec ce 9 à leur…neuvième album. Façonné à partir, selon les dires de Nick Allbrook, d’improvisations odieuses, il est pourtant cohérent et dévoile, comme à l’habitude chez Pond, son lot de titres élevés. Un peu éclaté, il débute au son d’un Song for Agnes presque baggy, électro, qui évoque Primal Scream et se fend de choeurs féminins spatiaux. Une réussite initiale, amenée semble t-il a en susciter bien d’autres. Ce que confirme l’enthousiasmant Human touch, up-tempo, sonique et lardé de sons qui déclenchent la jubilation. Dans l’urgence, Pond valide le bon début de son 9, crisse et enfante un boucan qui fait plaisir. America’s cup, funky, vient ensuite faire danser les fans. Le côté dispersé se confirme, ça n’empêche nullement la bonne tenue de l’opus. Le titre se fait électro-pop, pique un peu, lâche des boucles bienvenues. Comme quoi une base à priori absurde peut, c’est le cas ici, engendrer une issue solide. Pond a visiblement pris plaisir à concevoir son disque. On sent en tout cas, à l’écoute, une liberté inspirée de nature à créditer le rendu final.
Take me Avalon I’m young, sur des tonalités déliées, se déploie sans empressement. Il apporte des atours syncopés, quelques cuivres eux aussi tranquilles mais qu’on remarque. Qu’il trace ou opte pour une approche plus mesurée, le groupe se montre performant. Pink lunettes, discoïde, entrainant à souhait, entérine l’impression de dispersion mais aussi, et surtout, de diversité synonyme de qualité qui ressort de l’audition. Pond, de toute façon, n’a désormais plus grand-chose à prouver. Il lui faut toutefois, pour ne pas se fourvoyer, proposer des créations qui se tiennent. Il y arrive, Pink lunettes se termine dans l’apaisement après une cadence soutenue. Czech Locomotive lui emboite le pas, plus brumeux, céleste. Sans être négligeable, je lui préfère les essais percutants signés par le clan de Perth. Surprise, le morceau s’emporte, offre alors une teinte plus appuyée. Pond, sans formation stable, crée malgré ça des sorties valables. Le terme de Czech Locomotive prend même des airs mordants, amenés par des guitares répétées.
Plus loin Rambo, d’abord très LCD Soundsystem, impose un certain dépaysement. Il groove, alerte, et étaye efficacement un 9 dont la valeur n’est plus à mettre en cause. De partout fusent des bruits qui réjouissent, des élans juteux et mélodies soit polies, soit hérissées. On écoutera ce bazar de choix, dont la pochette insinue l’idée d’un contenu très psyché, à volume poussé. Gold Cup / Plastic Sole lui met fin, ou presque, tout en spirales flemmardes. Psyché, il l’est sans aucun doute. Progressif aussi, sans l’ennui que le genre peut parfois dispenser. Son décor est beau: il s’en dégage, de plus, des touches « wild » qu’on ne peut qu’approuver. Le savoir-faire de Pond, comme dit plus haut, est avéré depuis des années déjà. 9 l’illustre sur la durée, sans jamais faillir. A l’heure des adieux Toast, plutôt délicat, pose sa douceur et quelques cordes discrètes. Il se fend de belles incrustes, moins chatoyantes. J’aurais certes préféré davantage de polissonnerie mais ce n’est rien, pour le coup tout est bon.
C’est ce qu’on retiendra, en définitive, de ce 9 où Pond navigue sans contraintes, pourrait se perdre mais garde le cap et maintient une qualité régulière. A l’arrivée, il plait et n’écorne en rien le parcours de ses auteurs. Autant de raisons de ne pas le bouder, comme on peut parfois le faire avec ces formations auxquelles on n’accorde plus le même crédit, statut de « vétérans » oblige, lorsqu’elles en viennent au crépuscule de leur carrière. Pond, à l’approche d’un dixième album qu’on lui souhaite aussi attractif, évite l’écueil avec un certain mérite et selon une largesse stylistique notoire.