Trio basé à Manchester, Calva Louise s’inscrit dans une veine indé large où l’Espagnol s’invite. Où, aussi, les genres entrent en collision au profit d’un registre enlevé, servi par le chant de tigresse d’une frontwoman qui sait aussi sucrer son organe. Après Rhinoceros, sorti en 2019, il nous largue un Euphoric…euphorisant, qui pulse de partout. Une grenade de treize titres, qui d’emblée dégoupille au rythme d’un Free To Be Lost bondissant, vigoureux dans ses mélodies. Un début hybride, électro ici, rock plus loin, bourré de sons qui rendent accroc. Hunting, qui suit, faisant valoir la même adresse dans la juxtaposition des styles comme dans l’énergie renvoyée.
On peut s’attaquer, ensuite, à un registre plus « rnb » que des guitares acérées décorent à l’occasion (Tiranito); ça passe « crème », comme dit par chez nous. Ephemeral (Ft. Blakeeleven) enchaine, d’abord retenu bien que cadencé. Il s’enhardit, on retrouve non sans joie l’allant « cannelle-vitriol » qui caractérise la clique anglaise. Belicoso, en serpentant entre motifs dépaysants et rock rentre-dedans, crédibilise l’ensemble. Il semble que Calva Louise s’affaire, adroitement, à créer des contours bien à lui.
C’est même, au fil de l’écoute, un fait avéré. L’électro fait danser (Alcanzar), Trial torpille ensuite un rock aux mélopées qu’un tir tendu vient emporter. A côté de ça, on se tape des motifs un brin déroutants. Ca fonctionne. Le rythme se relâche, l’Espagnol agit alors comme un véritable déracinement. Other Self, s’il pose une féminité séduisante, bastonne aussi sans rémission. Inutile de forcer, Euphoric s’impose de lui-même et sans difficultés. Tous ses titres se distinguent, ses touches exotiques le parent avantageusement. On y danse, on y pogote aussi, en se laissant porter par une série de morceaux plutôt « Euphoric ». Mafalda s’y lie, aussi percutant que doucereux dans ses notes et vocaux. C’est, ici, le malaxage qui prévaut. Il est ajusté, changeant sans jamais nous perdre en route. Avec The Odds, on en vient à dix compositions et le niveau ne flanche pas. Euphoric tient bon la barre, POP(urrí) file et déboite, se syncope et cimente la maison avec de l’aplomb.
Le titre éponyme se découpe lui aussi, se tapissant au carrefour du dur et du groove. Enfin, on a pour boucler l’épopée un Orange blast cosmique, ultime fournée instrumentale -dispensable- d’un album qui se tient souvent bien. En optant pour une parure qui relève de plusieurs courants, Calva Louise finalise un disque rarement pris en défaut et impose une vision assez personnelle, et travaillée, pour qu’on valide ses efforts. La découverte est valable, dans le même temps on déniche un label, FRKST Records, où sortira aussi l’album de Strange Bones. De la matière indé, bien pétrie, d’un niveau égal et durable, sans faille criarde ni temps de creux ou excès de remplissage.