Outch! Un Tribute aux Sisters of Mercy « from Leeds » d’Andrew Eldritch! Le tout initié par Pedro Peñas Robles (Unknown Pleasures Records), aficionado du groupe sur sa première ère. Voilà qui a de quoi attirer, même et surtout moi le réfractaire aux relectures dont le cas, au vu du nombre de cover-bands de tout poil s’en venant polluer notre horizon musical, ne va pas en s’arrangeant. Mais j’aime les Sisters, au delà du raisonnable. L’achat des ressorties de First and last and always et Floodland fut un bonheur dark intense, obscurément démesuré. Alors dix-sept morceaux, signés par le gratin du cercle cold de nos terres, et notamment du label cité plus haut, ça ne se refuse surtout pas.
Premier constat: l’artwork est splendide. Musicalement, on se met au diapason en optant pour des titres « nés tôt » et des faces B dignes de ce nom. Driven Like The Snow by STRANGER DREAMS & MNFCTR ouvre le bal, d’abord atmosphérique. Puis le rythme cinglant inhérent aux Sisters se met en place, une trame cold aux basses tout en relief survient. On replonge, avec délices, dans les contrées de gris et de noir instaurées par les Anglais, à ceci près qu’ici chacun parvient à y insuffler sa touche personnelle sans massacrer le titre d’origine. Fidélité, logique, à une formation à laquelle on ne peut rendre hommage à la légère. On trouve les motifs qui vont bien, ça part de la meilleure des façons et Nine While Nine by KILL SHELTER & ANTIPOLE impose ensuite sa force de frappe syncopée, dotée de notes entêtantes.
Il me serait bien difficile, pour le coup, d’élire un lauréat. Je préfère distinguer l’ensemble, d’une si bonne tenue qu’au final on se l’envoie sans rien en négliger. De timbres dark en étayages cold choisis avec goût, en passant par une tracklist des plus réjouissantes, l’idée de « PPR » trouve de manière audible la plus accomplie des illustrations. Giving Ground by A WEDDING ANNIVERSARY, sur sept minutes où les synthés brodent des textures envoûtantes, où les guitares rugissent et carillonnent dans les ténèbres, se déploie doucettement mais avec du caractère. D’élans débridés en temps plus tempérés, le tribute touche au but. Marian -à la base, l’un de mes favoris- by SELFISHADOWS, m’emmène plus loin encore. Les basses, comme souvent, me rentrent dans le corps. J’ondule. Revigoré, le répertoire des Sisters of Mercy trouve une nouvelle vie. Amphetamine Logic by DELPHINE COMA, issu d’un recueil que j’usai jusqu’à la corde et continue à éprouver, là aussi un de mes morceaux fétiche, fait gicler son acide et ses riffs pénétrants. Nous avons en France, j’en suis et en reste persuadé, une nébuleuse d’artistes aux vertus étendues. Ca s’entend ici, comme sur leurs oeuvres personnelles respectives, tout en précisant que sur l’ensemble des « reworks », il n’y en a que 5 qui émanent de notre territoire. Burn by DEATHTRIPPERS, dans une sorte d’électro-cold forte, elle aussi, de sons qui stimulent nos sens de fans de trames dark, pose ses effluves presque sépulcrales.
Plus loin, Poison Door by YEARS OF DENIAL délivre un effort diaphane, appuyé, aux boucles célestes. La voix s’y fait moins sombre, une fois de plus on approuve le rendu. Body Electric by CHRIS SHAPE, de ses pulsions électro perchées et virevoltantes, produit un effet au moins égal. Son chant vient de loin, sa dynamique, en tout cas, fait des ravages dans le voisinage. Et puis tu as Heartland by VERSARI, soit Jean-Charles Versari et son projet que par ici, on adore au delà du raisonnable. La reprise est vrillée, veloutée dans le chant, « acidément » légère. Une bolée d’élixir en plus, dans un Honoris II parfaitement conçu et interprété. « My heartland heartland heartland », me surprends-je à fredonner dans la maisonnée. On The Wire by SWESOR BHRATER, finement incisif, me tire alors de mon bref exercice chanté. Sa voix aux portes du crooner dark, la beauté de son décor l’élèvent avant Flood II by SEBASTIEN FAITS DIVERS & HIV+, également racé dans son obscurité. A l’issue et après maintes réécoutes, on ira réexplorer la disco des Sisters mais aussi, car ils le méritent sacrément, fouiner dans les travaux des projets impliqués dans ce HONORIS II. Pour l’heure, l’élégance noire du morceau, son rugueux lancinant poncent toute possibilité de résistance. Puis Some Kind Of Stranger by OPIUM DREAM ESTATE (l’une de mes récentes trouvailles), d’abord susurré, impose sa lente progression. Tout en joliesse aux teintes d’ombre, il vient magnifier le tout.
Réussi en tous points, celui-ci transpire le vrai, l’immersion, la passion dans l’élaboration/relecture des morceaux. Colours by THE RAUDIVE me conforte dans mes dires, spatial et acidulé dans sa douceur. Dans la diversité de ses ambiances, dans sa justesse de ton, HONORIS II est bien loin d’être factice. On a fait le tour du propriétaire, semble-t-il. Mais comble du bonheur, des bonus surgissent de la nuit et ce sont les brestois fous et géniaux de MAMAN KÜSTERS, sur Inondations I –Flood I, donc- I qui greffent leur EBM frappée, chantée dans la langue de Molière, vaporeuse et insistante, à l’affaire. La magie opère, comme toujours avec ceux-là. Je parlais de gratin affublé du sceau UPR, ça se confirme avec Blood Money by VELVET KILLS (Bonus track), psychotrope, groovy, qui joue une cold-wave aux sons jubilatoires. Eldritch applaudirait, sait-t-il d’ailleurs qu’en son honneur se tient une oeuvre de tout premier ordre? Va falloir le lui dire, PPR! Black Planet by EUROPEAN GHOST (Bonus track), de son track hanté et énergique, noir au point de blanchir nos jours, lui plairait assurément. On en vient alors à la fin des festivités, on ne pleurnichera pas car outre un nombre élevé de titres recensés, il s’insinue sans effort dans nos zones à plaisir.
Alors Some Kind Of Stranger (Extended Version) by OPIUM DREAM ESTATE, en poussant son essai, en arrive à accroître la séduction qu’exerce l’égard. De sa dark-folk superbissime, il clôt une série d’envergure, d’une teneur dont on ne peut que s’engouer. Chez UNKNOWN PLEASURES RECORDS, quand on crée du son, quand on promeut un artiste, c’est tout sauf de la drouille de pélican. On carbure au réel, à l’authentique, on soigne le son autant que l’objet. Ca donne, à l’arrivée, des sorties dénuées de toute supercherie. Celle-ci en est, bien malin celui qui oserait s’y opposer. HONORIS II-TRIBUTE TO THE SISTERS OF MERCY & THE SISTERHOOD sort en septembre, il est toutefois d’ores et déjà dispo à la précommande et limité à 350 exemplaires. Prenez-en bonne note, une fois le disque épuisé il vous restera le numérique pour flamber auprès de vos invités et convertir le plus grand nombre à l’écurie UPR…
Bandcamp Unknown Pleasures Records / Soundcloud Unknown Pleasures Records