Rodeur musical autodidacte, ce qui enforce son mérite, et touche à tout inspiré, Huckleberry Finn Junior pratique un « folk néo old school » génial et minimal où banjo, guitare slide, guimbarde et harmonica bâtissent des trames prenantes. Partiellement enregistré sur un 8 pistes cassette, En route pour la gloire, premier opus du vagabond stylistique, vise juste et le distingue ostensiblement. Le timbre provient des chanteurs folk américains des 50’s et 60’s, par ailleurs ironie, satyre, révolte et d’humanisme constituent la matière de chansons vraies, sans trop d’écorce, à l’image finalement de leur auteur. C’est aujourd’hui demain, pour débuter, impose la patte du bonhomme. Celle-ci s’inscrit en marge, dédaigne les modes castratrices, et affiche de la vie.
L’harmonica y virevolte, l’instrumentation y est toutefois, comme annoncé, dépouillée. Visiblement, la méthode sied au gaillard, qui ensuite nous sert son Plus attendre. Mélancolique, racé à souhait, il folke avec finesse et sensibilité. L’usage du Français, dans le texte, en fait ressortir la teneur. Un jeu subtil, rustique, valorise et caractérise l’adepte de l’école musicale buissonnière. Happy, à son tour, nous touche. Parce que finalement, En route pour la gloire amène au bonheur -sonore, verbal- et nous amène à bon port. Celui de la gloire, donc: la notre, celle de ceux qui refusent l’opulence et la fausseté. Celui où on se sent chez soi, à l’abri du tintamarre sociétal et du bling-bling de la haute.
On explore donc, avec enthousiasme, l’univers de notre compagnon de route. La sienne fut, et reste, conséquente. Il a roulé sa bosse, libre. Le titre éponyme, alerte, marie allant et brio de l’instrumentation. Bluegrass, blues ou cajun, folk et intime, le disque d’ Huckleberry Finn Junior est une superbe surprise. Il chante la révolte et l’espoir, comme l’annonce la composition en question. Le banjo resplendit, typique et typé. Dans son sillage se trémoussent ses convertis, amoureux d’un son réel, exempt de tout subterfuge. A la source, ainsi que le prétend le titre qui suit. Paisible, c’est là une ode au cheminement non contraint. Et on reprend notre chemin…pour aboutir à un blues saccadé nommé La déveine. On a d’la veine, tout d’même! Magnifique. Huckleberry Finn Junior, à l’instar de son sénior, erre non pas de manière nonchalante, mais dans la superbe musicale. Quand j’partirai (Prends quand même ton temps mec, on est bien là! Reste donc un peu…), au moment de conclure, rajoute une louchée de sincérité. Un harmonica plaintif le zèbre, il est bien entendu à nu.
Le verdict est donc clair: En route pour la gloire, de ses sept morceaux, interroge le monde mais ne trompe pas le sien. C’est une pépite, telles celles qu’on sort de terre; brillante et, encore, maculée par la matière qui l’a vu naitre. Elle provient, de plus, de chez nous et démontre par conséquent que la qualité (tout à la fois textuelle et sonore) n’est pas, loin s’en faut, le systématique apanage de nos semblables hors-frontières. On est preneurs, ça va sans dire, d’autant plus que la galette de l’ami Huckleberry respire le vrai et se poste de façon délibérée à l’encontre des courants constamment imposés au sein desquels trônent bien trop d’artistes sans réelle profondeur.