Issu de Bruxelles, Whispering Sons avait déjà défrayé la chronique avec Image (octobre 2018), premier album darkwave/post-punk aux relents goth sous tension bridée ou plus vivace. Ce fut, assurément, l’un des musts de l’année concernée. Pour ce Several others, le quintette retranché, pour les besoins de l’enregistrement, dans les Ardennes exploite intensément le procédé qui lui sied tant, servant dix morceaux tout bonnement inattaquables. Dans l’unité, c’est Dead end qui ouvre la marche avec une basse qui ponctue et syncope le tout, dont le fond s’annonce prêt à rugir. Il impose, bientôt, ses saccades et son groove addictif. Et sa touche vocale, celle qui, depuis les débuts de Whispering Sons, caractérise le son du clan belge. La fin se fait plus bruitiste, parachevant une entrée en matière de choix. Ceci avant l’alerte et souillé Heat, cold-wave/post-punk, jonché de gimmicks décisifs et doté d’une énergie ouverte. Le disque est bien lancé, son début ne souffre pas la moindre contestation. L’urgence, sur ce titre, prédomine. Plus loin, on retient sa force et ça permet de varier les approches. De la méthode usitée résulte un album majeur, une confirmation étincelante du potentiel décelé chez Whispering Sons. (I Leave You) Wounded, plus « intime », recourt à des motifs électro, renvoie la même obscurité attachante que la plupart des compositions offertes.
Bien difficile, pour le coup, de ne pas plier. Quelle que soit la voie prise, la qualité fait son effet, perdure et élève Several others. Vision suinte, à son tour, les sons accrocheurs et cette patine froide, ainsi qu’une empreinte chantée de marque. Ses synthés brodent des volutes, subitement il s’emporte et riffe cru. Imparable, comme bien souvent avec les combos du Plat Pays. On le pressentait, on l’attendait, même, avec une impatience aiguisée par les jours passant. C’est maintenant chose faite, l’espoir est comblé et le rendu sans faux pas. Screens, indus dans sa cadence, serein dans son décor, évoquerait Nine Inch Nails dans ses assauts les moins directs. Flood lui succède en se faisant plus agité, tout en se parant d’atours spatiaux. Il s’intensifie, sert des encarts déjantés. On note et apprécie, une fois encore, la valeur de l’ornement. Surface, aux syncopes cold, s’emporte ensuite avec grâce.
Là où certains misent sur le frontal à tout-va, Whispering Sons fait le choix d’une intensité parfois étouffée, qui peut toutefois se libérer en d’autres recoins. Aftermath amorce la dernière ligne droite en restant posé, synthés et voix suffisent à le rendre significatif. On pourrait penser, néanmoins, que l’ensemble manque de furie. Satantango délivre alors une salve sous tension de fond, de nature à entériner la teneur générale de Several others, sa propension à rester sous tempérance avant, quand ça lui prend, de s’emballer. Ici, la montée en puissance est progressive. Puis Surgery, nettement plus tapageur, termine sur un boucan post-punk réjouissant à l’extrême. Il brise l’élan, avant de réinstaurer son tumulte. L’épreuve est franchie, le cap du soi-disant décisif deuxième album passé avec brio.
On valide donc, comme attendu, la personnalité d’une clique au talent certifié. A l’heure où pleuvent, en ce mois de juin, les sorties à cocher, on rangera celle-ci dans le rayon des parutions de première main, porteuses d’une patte toute personnelle. C’est bien le moins qu’on pouvait exiger de Whispering Sons, habile dans l’étayage de ses chansons comme dans la juxtaposition d’ambiances à la succession entièrement pertinente.