Hi there. I’m a guitarist/singer from France. Evil country/bayou/honky-tonk style. Hope you will enjoy!, peut-on lire sur le Facebook du bonhomme. Tu m’étonnes qu’on enjoy! D’autant plus que l’opus ici décrit est produit par Emmanuel Hereau, technicien de notre ville d’Amiens. Et que cette rondelle éponyme, qui fait suite à une démo déjà très digne (Containment Demo, avril 2020), regorge de vocaux rocailleux et délivre onze titres imprenables, amorcés par le bruit d’un moteur rauque. Un Broketown bluesy passé au papier de verre, pétri de style, à l’écoute duquel on comprend que pour les besoins de l’opus, T.Lawrence n’a pas rechigné à mettre les mains dans le cambouis. On n’est sûrement pas dans l’auto-tune, et pas plus chez un vorace de thune. C’est tout le contraire; on est dans du vrai, joué dans l’économie de moyens. C’est ce qui nous le rend, ce gaillard, si attachant. Et d’autant plus signifiant. Une voix criée s’invite, faisant de l’amorce une réussite indéniable. Behind the deer prend la suite, plus « pataud » et tout aussi racé. Il se fend, bourru, de sonorités fines qui en assurent le contrepoint. Et renvoie, comme de coutume chez T.Lawrence, une authenticité confondante.
On a aussi, de goût et de choix, des reprises qui ponctuent l’ouvrage, à commencer par le Dark in my heart de Lee Hazlewood. Folk et, vocalement, encore, typé. Presque dark-folk, même, et si nu, si vrai, à nouveau. Une chanson au jeu vivant, au point qu’on a le sentiment d’entendre le musicien jouer là, pour nous et à nos côtés, dans le strict respect des consignes…du blues, de la country et autres mouvances mises en avant par ses soins. Passin’ thru, ensuite, se dévoilant sous les mêmes apparats avant de laisser place à la seconde « cover » du disque: Long gone lonesome blues, de Hank Williams, ténu et bien orné, l’étayage assuré par…Manu Hereau « himself » lui donnant une certaine patine. Le Picard réinjectera, par ailleurs, sa touche personnelle sur plusieurs des titres à venir, en phase bien entendu avec l’univers de son protégé. On serait dans le tort, dans l’erreur, si on décidait de bouder le fruit de leur labeur. Ce dernier, affublé d’une pochette pas moins attrayante que son contenu, signée Sophie Lefort, mérite les égards.
Ainsi 44 Creek, doté des mêmes chants clamés que le début de l’effort, poursuit-il l’entreprise de sacralisation, accomplie, du blues et de ses passionnants dérivés. Persiste, récurrente, l’impression que T.Lawrence se tient là, proche, en fiable et fidèle compagnon musical. Rulers of darkness, à l’organe de crooner du genre concerné, sent la folk, pleine d’âme et de flamme. Le décor, une fois encore, resplendit. Unknown prolonge l’extase: il réitère ce jeu réel, sans fard, sans surcharge aucune, propre à l’artiste. Avec vigueur, avec passion, dans une rudesse qui étincèle, celui-ci pose le jeu quand arrive Friday 13th. Entre magie de l’instrument et impact de la voix, chaudement grave, on n’a pas fini de s’enticher. Et voilà que le sieur Hereau, sans jouer les héros, trop modeste pour ça, borde le morceau avec brio. L’union, ici, est juste. La connivence audible, le produit final sans défauts ni erreurs de parcours. Yellow mama, émanant du Tommy Brown Murder Plan -combo similaire, dans l’esprit, à ce que fait T.Lawrence- et dont il fait (ou fit?) par ailleurs partie, présente la fin des festivités dans une robe de bure, sur ce ton bougon qui sied à l’individu.
Enfin Long haired redneck, écrit à la base par David Allan Coe et remontant au mitan des 70’s, vient clore dans la brillance, serti de guitares « bonus » qu’on ne peut que prendre en compte, une enfilade de compositions qualitativement inattaquables. Un album d’écorce, de verdure et de vérité, de bois et de foi, au plus près de l’os. Un lingot intégral, brut et pourtant façonné avec dextérité, disponible via les deux « boutiques » mentionnées ci-dessous et ce, pour un prix défiant toute concurrence qui, de toute façon, n’existe pas et ne saurait tenir tête à ce disque éponyme remarquable. L’objet est de plus beau et exempt de toute mascarade, ce qui ne fait bien sûr qu’en accentuer la portée. A vos bourses messieurs-dames, mieux vaut dépenser une dizaine de boules pour T.Lawrence et son propos crédible que 20 ou 25 pour tout autre musicien dénué de profondeur.