(Peu) après le déjà savoureux Ouverture facile (octobre 2020), les délirants et singuliers Astaffort Mods reviennent avec Fermeture Administrative, où dix titres dézinguent les comportements, moeurs sociétales et autres incohérences à grandes lampées de tchatche façon Sleaford Mods du sud de la France. Comme on pouvait s’y attendre, ça groove sévère et ça pulse chanmé, comme sur le saccadé et éponyme Fermeture abusée, pas loin de m’évoquer L’Envoûtante de par sa formule. Les trois gus enchainent les tubes à la eux-mêmes, inspirés comme jamais. c’est Retour simple qui, en filant vite, impulse une série imparable à l’humour corrosif. Du bon, du très bon, dont on ne retrouvera l’équivalent nulle part. Basses louvoyantes, sons en rafales, débit affolé font que de suite, on jubile et bien entendu, on adhère à l’approche d’Astaffort Mods.
Qui, entre dérision et lucidité, où plutôt, lucidité passée au filtre de la dérision, réjouit à nouveau son auditoire. Sang chaud de la pampa, de fines notes en basses, encore, rondelettes, le confirme: les gaillards sont en grande forme, armés de refrains tellement (pas) cons qu’on ne peut que s’en enticher. « Trop rigoloooo !!! » C’est eux qui le disent, pas moi. « Elle est où la caméra, tu t’es pris pour Fantomas, ou quooii? ». Impossible de résister, Fermeture Administrative regorge de titres hauts en couleurs. Les mecs ont à nouveau placé la barre (de rire) très haut: bien malin celui qui, par ses sons et créations, saura la surpasser.
Belgica, qui consiste en une relecture maison du « And The Serf Caresses The Head of His Lord » de La Jungle, des copains de label, bazarde tout. Il conjugue, merveilleusement, la force technoise des Belges avec le verbe trépidant d’Astaffort Mods. Ca rugit, ça trace, ça tabasse. La chanson en question amène, de plus, un brin de nouveauté au registre habituel. Et puis il y a bien pire, il faut le dire, comme support à remix. Yvon le Trashos, au début sensuel, semble emprunter la même voie novatrice. Mais bien vite, il déblatère sur fond minimal…et écrin de guitares trash. C’est maintenant vérifié, Astaffort Mods étend son registre. Il n’en est que meilleur encore. Hilarant, aussi, dans ce qu’il évoque. Sentiment, à l’intro électro-indus bien dark, teintée de « Fait chier » et de « Putain c’est pas possible », part en sucette et ne fait pas dedans (je parle du sentiment). Ca chambre, sur ce disque. Pire qu’un Lillois croisant un supporter du PSG en ce début de semaine. Colonel Patate, dans un hip-hop lunaire au fond sombre, continue à explorer. Astaffort Mods, doué et vacciné, étire son champ d’action et ça génère sûrement pas la répulsion. Plouc, grooveur et bassifié à souhait, ferait verdir les deux lascars de « Manchesta! » (clin d’oeil aux frères Lagalère, de chez « Oeussisse… »).
Soyez-en sûrs, les énergumènes nous lèguent là un skeud phénoménal. Il mériterait d’être dans le journal, pour l’instant il est dans me platine et je m’en sers une grosse tartine. Mimizère, au débit quasi ininterrompu, se pare de motifs « trop bien », de synthés épars qui fleurent les 80’s. Ca pulse de partout, la Ford d’Astaffort percute la glissière et te fait mordre la poussière. Monstre foire se charge de terminer, sur plus de neuf minutes, en hip-hopant allègrement sur lit de séquences électro. Lesquelles, au fur et à mesure du morceau, frétillent de plus en plus. Excellent, mon cher Tissime! Fermeture Administrative est un must, et ceci à plus d’un titre. Non content de reproduire avec brio la recette de ses pères, il marque une avancée, stylistique, qui permet à la clique de grimper une marche de plus. On note évidemment, en plus de l’impact musical du bordel, une sacrée bordée de répliques et jurons made in Astaffort, de nature à certifier de manière définitive le cachet émanant des ouvrages de la formation hébergée chez A Tant Rêver du Roi.
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