Inlassable, increvable, affairé comme jamais, Mr Marcaille a élaboré des musiques improvisées, de l’avant rock, composé pour le théâtre, joué du thrash métal et écumé les festivals de théâtre de rue (Kraal, Violon Profond, Trash et Tradition, Amour, Rraouhhh!…). Et pas seulement, car je résume « grave ». Aujourd’hui, le barbu bourru ressort le violoncelle, le kit de batterie réduit, nous fait le plaisir de chanter comme un bucheron Danois, et nous trousse comme à la parade un album de métal beuglant, tantôt doom, tantôt trash de barbare, génial. Oui, génial. Déjà, il officie seul, en one man band capable du meilleur et jamais du pire. Le meilleur quel que soit le genre choisi et pour le coup, il renoue avec la puissance métal, qu’il transcende en faisant rugir son instrument. Allez on part à la guerre -normal, le gaillard vient de Verdun- et la boucherie débute, impulsée par Spike.
Diantre! Le riff est cru, le registre superbement basique. Nul besoin d’en faire des tonnes, le minimum suffit. Amplement. Du trash qui crache, un brin black dans ses voix, dont Marcaille va nous abreuver dix titres durant. Naatas, le second d’entre eux, éructant comme jamais. Mazette, ça me rappelle les DSK, défunt groupe de ma ville. Marcaille n’a que peu de failles, Marcaille déraille et je vous conseille fortement de le suivre dans ses élucubrations. Pro Satan, rien que par son titre, impacte sévère. Il prend une tangente psych-doom, plus lourd qu’un parpaing. Qu’on ne s’attende pas, ici, à ce que le bonhomme gazouille. C’est tout le contraire, Pépère, et tu trouveras pas mieux.
Passé cette noire giclée, mortifère et addictive, Maggie’s Dead balourde une soufflante d’à peine une minute. C’est dire les dégâts causés, qui font qu’à l’issue on sue…et on en redemande! Requête satisfaite, Beer time et son hardcore de durée une fois de plus restreinte, compact, venant régler le compte de l’auditeur récalcitrant. Mais si tu connais Mr Marcaille, t’façon, t’as déjà donné un biffeton. Pour son son. Reconnaissant, le mec te sert, en retour, un Mon Amour de cinq minutes. Il sait se faire aimer, on ira même jusqu’à s’enticher de ses vocaux animaux. Le morceau est doom, pachydermique. Un brin psychédélique, aussi. On s’enfonce, avec délices, dans l’extrême. Fuck Off And Die, explicite, joue un hardcore-métal ramassé. Si t’aimes pas, va écouter Dave. Eat Your Brains se permet d’aller tutoyer, insolent, les pointures du métal crié. Trop bon.
Avec infine, d’abord flou et grinçant…au point d’engendrer un drone sans lumière, le clapet se referme. Marcaille a vaincu, il tire d’ailleurs une dernière salve nommé Wall of death. Dans son vocabulaire comme dans ses textures sonores, le gonze est sans équivoque. Son No Snare No Headache est un tour de force « à la lui-même », on ne sait d’ailleurs de quoi se constituera la suite de ses pérégrinations. C’est ça qu’est bon: Mr Marcaille, facétieux, imprévisible, aime faire dans l’inattendu. C’est son terrain favori: celui de la liberté, de l’inédit, de l’exigeant jusqu’à, presque, devenir éprouvant. Mais, au final, irrésistible et entièrement captivant.
Bandcamp Mr Marcaille / Bandcamp La Face Cachée / Site Urgence Disk / Site Aredje