Heimat, c’est Olivier Demeaux (Cheveu, bidouilleurs émérites) & Armelle Oberlé (The Dreams, dont le génial et barré Morbido a été réédité par Replica Nova en février dernier et de suite chroniqué ici). Une union aux p’tits oignons donc, forcément pas commune. Un chant initié par Armelle, pluriel dans les langues utilisées, dont un Allemand qui lui file des airs de Malaria, ou encore de l’Italien. Ca exotise le tout, à l’organe d’Armelle se lient les créations d’Olivier et autant ne pas tarder à la prétendre: le trip est un délice. Ita, bourré de percus colériques, indus-cold, fait déjà feu de tout son. Il cogne, dépayse de par le langage instauré. C’est un premier jet sauvage, relevé par les vocalises mutines et gouailleuses de l’élément féminin. Inquiétante, enlevée, la trame met déjà la concurrence à l’amende.
J’adore, Théodore. Quando, où l’Espagnol ne fait pas le mariolle, dégageant une belle classe, voit ce dernier entrer en collision avec des vagues dignes de…The Dreams, dont vient Armelle. Je l’ai déjà dit, me dites-vous. C’est que j’aime beaucoup, alors. Et puis le père Demeaux, on peut lui faire confiance: il bifurque, désoriente, signe des décors sans égal. Baggersee en tire profit, on est autant dans le cold que, selon les sonorités instiguées, dans du tribal ou du quasi « insulaire ». Armelle m’évoque de son côté, et c’est pas rien, Bettina Köster.
Kàvernié, dans le même dénudé que les titres précédents, laisse une impression d’inachevé, trop bref pour convaincre. Dommage. Mais le reggae spatial d’ Unterwegs, où Lise Barkas joue des Musettes Centre France, remet le trip au goût du jour. Deine frau, perché, se passe de rythme. Il chope l’esprit par les glaouis, s’élève, imposes ses lentes vagues dreamy. Tu miedo lui succède, plus alerte mais aussi céleste, nuageux. Les effets de ce Zwei sur le psychisme ne sont plus à prouver: ils en font, d’ailleurs, un précieux disque a-normal qui fait du bien au bocal. L’éponyme Heimat, mis en valeur par des sonorités à nouveau vrillées, indéterminées, « trippy » et ingénieuses, valide s’il le fallait encore la symbiose entre les deux comparses. J’adore Cheveu, vu en live à deux reprises. J’adore pareillement The Dreams, le vinyle de Morbido est l’une de mes références absolues. Alors Heimat, pensez donc…et puis ça sort, ce beau bordel, chez Teenage Menopause Records et Cry Baby. De belles écuries là aussi, où les choses sont faites avec passion et indépendance bien appliquée, assumée avec fierté. La colline, de ses airs folk brefs et lo-fi, aurait toutefois mérité de s’étirer. Son hypnotisme en aurait fait une bien belle pièce.
Photo Cor Bay.
Ne pleurnichons pas, Die! met le récalcitrant à mort. Lise Barkas y réintervient, le morceau convulse et laisse filtrer des sons acides. L’étrangeté de Zwei me le rend difficilement dispensable. Fin, sur…34 secondes dark qui auraient pu et du, à mon sens, se prolonger -c’est là le seul bémol qu’on puisse opposer à l’album-, lui met….fin, bien sûr. Le panel visité est givré, dingo, passionnant. Il dépayse, titille le psychisme, charme par ses décors inédits. Par, aussi et tout autant, ses voix entre coquetterie et obscure subversion. Heimat n’a pas failli, il vient de me faire adhérer à son répertoire avec le même enthousiasme que pour The Dreams et son Morbido. L’exploit est de taille, Zwei est de taille et Heimat appelé, je l’espère vivement et sa discographie semble le présager, à durer. Fort d’efforts comme celui-ci, il se hisserait bien vite vers les sommets de la loufoquerie géniale, réservée à ceux qui savent et par conséquent plus précieuse encore.
Bandcamp Heimat / Bandcamp Teenage Menopause Records / Bandcamp Cry Baby