A l’heure de la sortie de son trois titres « Basic needs » sur WARRIORECORDS, la paire constituée d’ Hélène de Thoury (instruments) et Amandine Stioui (voix) répond à nos questions…
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Photo anneraffin annomane.
1. A quoi renvoie le nom de votre projet, Minuit Machine donc ?
Hélène : À la base j’ai choisi ce nom lorsque j’ai lancé le projet, parce que je cherchais deux mots français qui évoqueraient l’idée de la nuit et de l’électronique. Nos influences au début étaient très tournées 80’s, maintenant ce nom ne correspond plus autant au son vers lequel on évolue mais on ne peut plus le changer, il fait partie de nous !
2. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur l’origine du duo?
Amandine : C’était en 2013, je cherchais un groupe plutôt orienté rock / grunge, et je parcourais les annonces sur Zikinf (à l’ancienne !). Je suis tombée sur celle d’ Hélène, qui m’a tout de suite interpelée. D’abord, c’était rare de voir des annonces rédigées par des meufs, ensuite j’ai écouté sa démo et j’ai eu un vrai coup de cœur artistique. Ça ne correspondait pas du tout à ce que j’avais en tête, et je n’avais jamais entendu ce genre de musique avant, puisque j’étais plutôt branchée rock alternatif.
Je l’ai tout de suite contactée pour lui proposer un chant sur sa démo, et notre premier titre, Agoraphobia, est né ! Humainement ça a tout de suite matché, je me souviens qu’on discutait non-stop la première fois qu’on s’est rencontrées, comme si on se connaissait depuis toujours !
3. Vous sortez des disques depuis 2003 2013, votre discographie inclut désormais 6 sorties tous formats confondus. Considérez-vous avoir imposé votre touche, et quel regard portez vous sur ces (déjà) 8 ans de créations sonore ?
Amandine : On se dit souvent qu’effectivement notre son est assez « unique », sans prétention aucune, mais plus dans le sens « hybride » et assez compliqué à définir. On a toutes les deux des influences complètement différentes, un parcours musical différent aussi, et on s’efforce de combiner toutes nos influences dans chaque track qu’on compose. On discute beaucoup avant de débuter la composition, pour déterminer une direction artistique, même si on obtient rarement exactement ce qu’on avait en tête !
Je crois qu’on porte un regard assez critique sur nos créations, car on a énormément évolué ces dernières années, tant au niveau de la technique que de nos goûts musicaux. Alors ce qui nous faisait kiffer en 2013 ne nous plaît plus forcément aujourd’hui ! Il faut aussi savoir qu’on s’est arrêtées pendant trois ans, de 2015 à 2018. Forcément, le son de 2019, l’album « INFRAROUGE » nous semble clairement différent de ce qu’on faisait avant, notamment parce que ce break de trois ans nous a permis de murir sur plusieurs tableaux et donc de présenter un travail plus abouti.
Aujourd’hui, on a pris une direction beaucoup plus techno/EBM, tout en gardant cette touche « darkwave » qui nous caractérise.
4. Basic needs, votre nouvel EP, sort fin avril. Qu’y abordez-vous ? Comment s’est passé l’enregistrement et comment fonctionnez-vous au sein de votre duo ?
Hélène : On avait toujours la même façon de procéder jusqu’à présent. Je composais la musique et Amandine composait le chant puis je mixais et masterisais le tout. Nos rôles étaient bien distincts. Sur notre EP précédent « Don’t Run From the Fire », Amandine a commencé à ajouter quelques éléments, quelques mélodies et ça a vraiment apporté quelque chose. Sur « Basic Needs », on a continué sur cette lancée et cette fois-ci Amandine a en plus mixé les trois tracks. On a beaucoup plus échangé et le résultat nous ressemble d’autant plus.
Amandine : Les paroles sont assez minimalistes. C’était une volonté de ma part de ne pas encombrer la composition musicale, et surtout d’aller droit au but. Les sujets nous tiennent néanmoins à cœur. Dans « Sisters », j’évoque l’idée d’un lien indéfectible et invisible qui existent entre toutes les femmes, une sororité, qui nous permet de mener notre combat au quotidien. Dans « Vanity », je parle d’amour, ou plutôt de l’absence d’amour et de la confusion qui peut exister entre différents sentiments. C’est plutôt l’amour en tant que projection de soi-même, du narcissisme à l’état pur !
5. Basic needs insinue t-il, par son intitulé, le besoin de revenir à des choses plus « terre à terre », de se dégager d’une sorte de « sophistication » dans les besoins que nous exprimons ?
Amandine : On peut l’interpréter dans ce sens effectivement. La période est propice à un retour aux sources, se contenter de choses simples et apprécier les petits bonheurs au quotidien, plutôt que d’essayer à tout prix de se fixer des objectifs de vie sur le long terme. Mais en écrivant « Basic Needs », je me suis mise dans la peau d’une personne désabusée, qui reproduit constamment les mêmes schémas sans parvenir à s’en dépêtrer et se place en situation d’échec perpétuel. Pas très réjouissant ahah !
6. N’est-ce pas cathartique, en ces temps de pandémie, de concevoir un EP ? En quoi Basic needs vous aide t-il à surnager face à des conditions qu’on sait difficiles ?
Hélène : Oui complètement ! Je pense que tous les artistes se sont sentis dépossédés et impuissants devant la situation depuis mars de l’année dernière. Il y a eu beaucoup de remises en question. Le temps que l’on a gagné avec l’arrêt des concerts a été angoissant bien sûr, mais il a aussi constitué l’opportunité d’enfin pouvoir se plonger sur la composition. Car mine de rien, tourner demande beaucoup de temps, entre la préparation, les répétitions, l’évolution du set, le merchandising à préparer etc etc. Et puis on tourne beaucoup à l’étranger donc il y a le temps du voyage, le retour, le temps de s’en remettre parfois aussi ahah.
On est souvent en train de composer les prochaines sorties au milieu de tout ça. Là, on a enfin pu se poser et prendre du recul, réfléchir sur ce vers quoi on voulait aller musicalement et professionnellement. Et je pense que grâce à ça, on est encore plus en phase avec ce que l’on crée. Mais évidemment, on a hâte que les concerts reprennent pour pouvoir maintenant présenter tout ça en live !
7. Vous jouez une musique sombre et « nuptiale », traversée de chant rêveurs. Qu’est-ce qui vous a amenées à cette orientation musicale ?
Hélène : Musique sombre, ça on ne peut pas le nier ! C’est certainement le fil conducteur depuis le début. Je pense que cela fait partie de nous et la musique est très libératrice. Par contre « nuptiale », je ne vois pas bien ce que tu entends par là. Si c’est pour le côté « épique » ahah, oui je pense qu’on peut effectivement la décrire ainsi, parce que l’émotion a toujours été le point central de nos compos. Et allié avec le côté dansant, il y a une certaine puissance dans la musique, un truc qui te prend aux tripes.
Amandine : C’est fou comme la manière dont notre musique est décrite est parfois en totale opposition avec la manière dont nous la percevons ! Concernant les chants, ils me semblent au contraire très terre à terre, et ancrés dans une réalité pas toujours évidente à affronter. Pour le coup, cette orientation musicale relève du pur hasard, un concours de circonstances, une rencontre avec Hélène et un mélange de nos influences !
Photo Romain Guede.
8. Minuit Machine est maintenant signé chez WARRIORECORDS, pouvez-vous nous apporter des précisons sur ce label et votre arrivée en son sein ?
Amandine : Warriorecords c’est le label fondé par Rebeka Warrior (Sexy Sushi / Mansfield TYA / Kompromat). Il se définit comme « queer, transféministe, anti-raciste et résistant ». Lorsque Rebeka Warrior nous a contactées, on était hyper flattées qu’elle s’intéresse à notre projet, d’autant qu’en France très peu de personnes nous connaissent. On connaissait déjà ses activités et on s’est dit que sortir un EP sur son label était une super opportunité et l’occasion de rencontrer une nouvelle scène.
On est en auto-prod depuis plusieurs années sur notre label « SYNTH RELIGION » alors c’est vrai que c’est parfois difficile de lâcher prise (surtout qu’on est un peu control freak, on ne va pas se mentir ahah), mais toute l’équipe WARRIORECORDS est très professionnelle et se démène pour la sortie de notre EP !
Hélène : Ultra control freak haha l’une comme l’autre ! Mais ça fait tellement de bien de rencontrer de nouvelles personnes, des personnes bienveillantes et qui croient en nous ! Car en tant qu’artiste, tu passes forcément par des moments de doute et surtout comme je disais, de remises en question qui se sont accentuées depuis l’année dernière. On avait vraiment besoin de ce coup de boost !
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