Fab: guitars/vocals; Jean: bass et Ugo: drums sont de Clermont Ferrand, font de la noise et rappellent les bien bons Basement. Ils sont produits par David Weber (Drive Blind, Tantrum, Condense et Portobello Bones, soit la fine fleur de la noise de nos campagnes). Ils constituent BLACK INK STAIN et si mon avis vous importe, ce Incidents qui est tout sauf un incident, troussé par leurs soins, risque de faire parler d’eux en termes chaleureux. Après un premier EP sorti en avril 2017, en effet, les comparses se fendent de huit parpaings massifs, riffeurs et sans ratures. L’ensemble est parfait: on en prend d’ailleurs plein la trogne, de suite, au son de ce Slice of pain initié par une batterie lourde, une basse toute en chair et des guitares au scalpel.
Le bazar est meurtrier, digne des plus grands de son créneau musical, beuglant et entrecoupé. Puissant comme un Treponem Pal, en dépit d’une orientation différente, méchant sans être bûcheronnant à outrance, il offre avec brio des encarts mélodieux. Everything Gets Distorted, comme le dit un opus de nos libournais préférés mentionnés au début de mon écrit. I see you dead, méchamment noise, se souille et groove parce que derrière une approche percutante, la rythmique ne manque pas de souplesse. Tout est bon, ici et de toute façon. On sait de plus, quand il le faut, aérer l’ensemble.
Sans façon, sur la même voie que ses prédécesseurs, rugit tout en se montrant leste. Ses riffs répétés produisent un effet considérable, ses motifs éclaircis en amplifient l’élégance. Bien que privé de chant, il n’en souffre aucunement. ST02 le suit, ne s’écarte pas du sillon tracé par les Auvergnats. Ce serait un tort, le procédé débouche sur des plages qui n’ont rien à envier à quiconque. Le riffing est roi, on a de plus la bonne idée de tempérer ses ardeurs sans fissurer le rendu final. Stuck et sa basse une fois de plus ronde, ses spirales de guitares aussi claires qu’excitées, sa force de frappe décisive, nous braille dessus et on en redemande. A Clermont on ne trouve que du bon, la cité du Massif Central est une place forte du son qui crisse. A ses disques fétiches, il conviendra d’ajouter Incidents que Pont des Goules, « allégé » si je puis dire lorsque ses vocaux et instruments se font plus aériens, complète efficacement.
Photo: Anastasie Viala.
La série instaurée, comme dit plus haut, s’écoute d’une traite et se veut pertinente, dénuée de recoins dommageables. Sur Frozen Stance, plans instrus merveilleux en amorce, passages distordus et élans « assagis » font bon ménage. BLACK INK STAIN met du coeur à l’ouvrage, ne flanche pas, grimpe une à une et sans trébucher les marches qui le mèneront tôt ou tard au statut d’étalon noise hexagonal. Il met fin à son oeuvre en alternant cris et vocaux modérés, sur une chape pesante et, comme toujours, jouée à grand renforts de motifs attractifs (S.O.M.A). Il sera difficile, dans le genre, d’égaler ce Incidents en tous points réussi. Qui, sur le second volet de son final, prend une tangente presque céleste pour ensuite revenir aux plans opulents qui la plupart du temps le caractérisent. L’affaire est pliée, rondement menée. Le trio peut alors envisager la suite avec sérénité, doté d’une rondelle qui en séduira plus d’un et lui permettra des scènes incisives quand le chemin des planches sera à nouveau libre.