Parait que l’Anglaise Jane Weaver a jusqu’alors tâté du rock spatial, à sa manière. J’avoue n’en rien savoir, je la découvre avec ce Flock sans flop, qui présente une vêture dream-pop sacrément attrayante. Au gré de trames légères, en effet, mais acidulées, dix morceaux rêveurs nacrés par des synthés à l’usage habile, un brin polissons, couronnent un album qui est loin de n’être que le coup d’essai de la dame, affairée à « sonner » depuis 2002 et son Like An Aspen Leaf. Avec Heartlow, déjà, on attaque en terrain dreamy: l’ambiance rappelle le shoegaze, les vocaux pop doucereux et bien ornés font leur effet. L’entrée se fait par une belle porte, vivace et, dans le même temps, sereine mais salée. The revolution of super visions, de sons de guitare addictifs en planerie funky, fait lui aussi son effet. De manière régulière, des sonorités plaisantes, voire plus, s’abattent sur les efforts de Weaver. Il ressort de tout ça une atmosphère, un songe truffé de remous, qui créditent ce Flock souvent accompli. Stages of phases, rock dans l’esprit, on ira jusqu’à dire, même, space-rock aussi leste que cotonneux, parfait d’ailleurs un trio d’ouverture sans brèches.
Il m’arrive de penser à Blonde Redhead, ou au Cocteau Twins de certains opus, à l’écoute de Flock. Son identité est assurée, il ne fait pas dans le prévisible. Lux le fait s’envoler, il est toutefois trop bref pour complètement s’imprimer dans les esprits. Modern reputation, dans un crachin qui évoquerait un My Bloody Valentine « tempéré », lui succède magnifiquement. Et prestement. Ca donne l’envie, tout ça, d’aller explorer ce que fit Jane avant ce disque qualitatif. Avant cela, l’éponyme Flock et sa psych-pop dans le vent nous remet sur les bons rails ou plutôt, dans une voie lactée, étoilée, que la Britannique sertit avec brio.
A sa suite et sans nous faire prendre la fuite, Sunset dreams pose un climat exotique, délié mais que des sons à nouveau singuliers, une basse ronde également, enrobent. Tout est ici bien fait, avec personnalité et dans le souci de construire, de façon évolutive, un univers à soi. L’entreprise se solde par de belles pièces, All the things you do en est. Céleste, minimal dans son étayage, il permet à son tour un trip appréciable, sans heurts mais sur des tons haut perchés. Fire Records, le label de Jane, nous livre derechef un album solide. Pyramid schemes, cold et funky, y place des élans dansants. Le savoir-faire, sur Flock, est omniprésent. On y erre sans s’égarer, on tente des choses avec, au bout du compte, la réussite et du panache dans la mise en place. Voilà un album de nature à générer l’évasion, en nous retenant dans ses recoins accueillants. On fera, volontiers, un bout de chemin en sa compagnie. On ira même jusqu’au terme de l’errance, bienfaisante, qui prend fin sur ce Solarised solaire et astral, appuyé aussi, que des fulgurances ouatés traversent.
Photo Razullah1
Flock est donc, sur la durée, convaincant. Porteur d’idées fructueuses, sans détours trop poussés, il a le mérite, dans le même élan, de s’écouter aisément et d’instaurer un rendu singulier. C’est bien assez pour qu’on lui accorde notre temps, qu’on ne perdra assurément pas. Au contraire, l’audition optimisera le moment vécu et suscitera une trouvaille -c’en est une pour moi- notoire, dans l’attente des sorties à venir sous étendard Fire. Au sein desquelles, histoire d’aiguiser l’impatience de ceux qui me lisent, se trouvent Pere Ubu, Howe Gelb, Half Japanese, Josephine Foster ou encore The Groundhogs, pour faire court et ne citer qu’eux….