Pour notre plaisir, Born Bad poursuit son entreprise de défrichage-dénichage, sous appellation Wizzz! Cette fois et pour les besoins du volume 4, une nouvelle sélection de raretés 60’s/70’s, « chopées » dans les contrées délaissées de la galaxie pop francophone, illustre l’effort présenté. Qu’il s’agisse d’artistes reconnus, d’autres en arrière-plan ou encore d’illustres inconnus, tous trouvent place dans le recueil et y vont de leur ritournelle, issue des 60’s tardives autant que des 70’s les plus datées. A l’arrivée, on obtient seize titres au spectre complet, que le funky et jalousant Je suis jaloux, de Dakkouri, inaugure avec brio. Cuivré, doté d’un cachet rétro certain, dédié à l’amour, il lance la danse. François Berheim, avec Tom, prend des accents Gainsbouriens assez distingués. Il se corde avec emphase, renvoie du style. On est là dans une qualité que Born Bad, une fois de plus, exhume avec talent. Michel Handson impose Le Bric a brac rimeur, jazzy bluesy, en consolidant la sélection. Matty Kemer fait voleter son Boeing, suivant une trame faussement feutrée. On relève, à chaque titre entendu, la brillance de l’ornement. Ici, il se fait piquant dans sa classe et sa belle étoffe. Gilles du Janeyrand, de son Filles 2000 au fond tordu et déviant, sert alors un morceau tout aussi attachant et concluant.
Au delà de leurs qualités intrinsèques, ces compositions font étinceler une créativité qui, à l’époque, battait son plein. Alain Ricar la crédite d’un I like Sex qui mêle les voix, l’une féminine et sucrée, l’autre masculine et plus enhardie. Il a des airs de B.O., se veut audacieux mais aussi racé. C’est peut-être bien, pour le coup, ce qui qualifie le mieux ce Volume 4 qui valide d’ores et déjà la recherche instiguée par Born Bad. Laquelle, au son de Paul Dupret et son Je t’aime trop, vire bourru, rock et, comme de coutume, bien mis. La découverte est notable, il est rare qu’un titre déçoive ou suscite l’ennui. Richard Hertel joue Patatras Hola, un brin exotique. Sur Wizzz! et je l’avoue sans honte, je ne connais personne. Mais j’aime tout le monde et le plaisir de la trouvaille l’emporte sur toute autre forme de ressenti. Liberatore, sur Vedette Internationale, use du cuivre et fait étalage, textuellement, de prétentions artistiques hautes en couleurs. Alain Serco, avec Kiki, lui donne suite façon folk-chanson animé, aux sons imaginatifs et dépaysants.
Quelques effluves à l’ancienne plus loin, Gérard Gray nous présente Le poisson vert. Psych-pop, la chanson maintient un intérêt optimal. Ses sonorités, comme à l’habitude sur la rondelle, se montrent ingénieuses. On se rend alors compte que depuis, peu de choses ont été inventées. Tout ou presque, à l’époque, était déjà là, en l’état. François Faray chante Le grand méchant loup, entre guitares acidulées et vocaux où des rires de dame trouvent place. A chaque morceau, son lot de petits détails décisifs; à l’ensemble, une valeur qui de ce fait demeure optimale. Patrice Lamy lui lègue un Laisse moi me dire que je t’aime PART1 léger mais alerte, groovy, mis en exergue par une voix féminine doucereuse et des vagues jazz remuantes. Sur le plan stylistique, French Psychorama 1966/1974 fait preuve…de style.
En fin de recueil, le Sidi Bou de K.R. Nagati délivre une instrumentation où cuivres et textes se frottent à un registre enlevé. Une petite pépite, encore, qui laisse ensuite Les Missiles, embarqués dans La (nouvelle) guerre de 100 ans, performer un titre aux « la-la-la » obsédants. Vingt ans après sa première édition, Wizzz! fait mouche et justifie amplement sa pérennisation. Là où certaines compils finissent par se mordre la queue, il continue à s’avérer attractif, sans fautes de goût. Ou si peu. Michel Didier lui met fin avec Comme un arc en ciel, sur lequel des cuivres (Wizzz! en fait un bel étalage, on appréciera) de choix, de même qu’un chant de fille encore une fois décisif, se montrent à leur avantage. Wizzz! Volume 4-French Psychorama 1966/1974, outre sa singularité musicale et le mérite inhérent à ses trouvailles inattendues, propose de plus une fiabilité musicale, une diversité de tons ne nuisant aucunement à l’impact du tout, qui lui donne des airs d’indispensable. Notamment dans sa version vinyle, en phase avec l’ère visée et porteuse d’illustrations magnifiques.