Groupe de Lyon, mené par un trio de chanteuses et fondé par le guitariste producteur Kid Victrola, Gloria puise son inspiration, ici bluffante et enchanteresse, dans les 60’s. Et d’autres ères. Un premier album en 2016, puis un EP 6 titres en 2018, tous deux bonnissimes, ponctuent jusqu’alors son parcours. Mais garde à vous, soyez prêts et préparez vos platines: ce Sabbat Matters d’une splendeur absolue, aux harmonies vocales plus belles que ma belle, aux élans nerveux qui ne font que les faire reluire davantage, fait franchir un cap supplémentaire à l’équipe rhodanienne. Relatif au Sabbat, illustré par un dessin inédit de l’illustratrice française Nicole Claveloux, pionnière du graphisme psychédélique en France dans les années 70, l’opus étincèle de partout. Multi-genres, il passe de l’un à l’autre, ou les relie, superbement. Folk et pop, fuzz et garage, harmonies insolentes de beauté: voilà ce qui, à l’écoute, nous dégringole sur la trogne. Plus en nerfs que les sorties précédentes, bien que son thème dominant soit l’Amour de l’autre, il commence par un premier tir imparable et éponyme, au début dépaysant. Et blam!, voilà que le velours pop enlevé du sextette, doté de griffures qui en déchirent la matière, ensuite réhabilitée par ces voix à l’union magique, grimpe « direct » sur le podium .
Converti ou presque, on a ensuite à se fader -c’est tout sauf une corvée- la saccade pop ornée avec superbe de Holy water, où finesse des vocaux et allant rythmique se passent la bague. Tout est beau, le beau ajouté au beau résulte en toute logique sur du magnifique. De caractère, de subtilité comme l’est l’introduction de Space rocket. Avant, tout de même, de faire tonner le ciel. Avec classe. Les guitares s’offrent là une envolée psych-fuzz du plus bel habillage, puis Miss Tambourine (à la porte du plaisir) nous impose son alternance entre charme vocal et coups de tonnerre instrumentaux. Tout ça obéit à un dosage savant, se pare d’envolées acidulées, jusqu’à rafler la mise parce que Gloria, c’est du lourd.
Le temps de quelques applaudissements (sur le disque, mais on acclamera nous aussi l’oeuvre en présence, et pas qu’un peu…), voilà pour nos esgourdes en pleine extase Skeletons (long). Des chants au sommet, soudainement une pointe acérée que ceux-ci surlignent et bim!, on se retrouve avec une énième merveille plantée sur sillon. Le tout sans répit aucun puisque You had it all, rythmé et posté au carrefour des époques, nous régale à son tour. C’est pire que le bon vin, ce Sabbat Matters. Il enivre et appelle à rester dans la dépendance. Pour cela, il s’appuie sur les notes d’un Back in town qui lui aussi, célèbre l’union des vocaux-soleil et d’une instrumentation qui refuse, entre le rude et le doux, de se positionner. Comment tu veux, toi, résister à tout ça?? Essaye même pas, dirait le Nordiste. Soumets-toi: à ces voix, à ces guitares, à cette rythmique qui serpente sur tout type de pente.
Cale-toi bien aussi, histoire d’en profiter pleinement, ce Dance with death à la retenue au bord de l’éclatement. Dans l’éclat. Dis-toi que des rondelles comme ça, ça mérite d’être usé à force de tournoyer. Prépare ton saphir, ça sera pas pour le pire. Night biting, entre guitares qui assaillent et bass-batt’ qui louvoie, mord avec élégance. Après l’album de Hoorsees, Howlin’ Banana, associé pour le coup à d’autres casbahs musicales dans le même esprit et de même importance, frappe fort. Une fois de plus. Gloria nous sert du ptit lait (humour un peu facile, j’en conviens…), tiré au pis d’une formation qui réalise un coup de maître. Global warning, tout en fuzz et vigueur mélodique envoûtante, se chargeant de finaliser ce Sabbat Matters qui « matters » de bout en bout.
Le verdict est, par conséquent, clair comme de l’eau de roche: Gloria, avec ce disque sublime, va ravir à la première audition. A Lyon comme partout ailleurs, il nourrira de la meilleure pitance nos appareils à son tout en trompant le manque, cruel et grandissant, de son live dont les soi-disant « élites » nous privent depuis une éternité déjà.
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