Suf Marenda, à la tête de Petit Bourgeois Sauvage, s’applique à ne pas faire dans l’attendu. Par sa poésie désenchantée, sur ce bien nommé Specimen Triste qui transpire une sorte de rock littéraire bien lo-fi et électroïde, il nous gratifie d’une belle K7 à l’ancienne, étayée par dix morceaux impeccables et éditée, bon point certain, par Distag Records. Parklaan et son refrain susurré, sa vitesse d’exécution, ses grésillements et son groove font que tout de suite, on pousse le volume. Et voilà que, reconnaissants, les synthés d’ Et pour le peuple s’affolent, à l’instar du titre en question, pour surligner des textes de choix. S’il a le verbe inspiré, Petit Bourgeois Sauvage, plus sauvage que Bourgeois d’ailleurs, affiche aussi une certaine adresse dans l’étoffage musical, minimal et efficiant. Il impose une trame céleste, au chant narratif, qui vite s’agite (Vending machin). Le fond est froid, la voix blanche. Il y a du Gontard dans la diction, A Karen qui ne valait pas rien confirme, sons bien bons à l’appui, l’attrait qu’engendre l’opus.
Plus loin, What Do(udou) i Get amuse, laisse ses claviers, une fois de plus, broder des thèmes singuliers, ici presque orchestraux. On n’est sûrement pas chez les Buzzcocks, on est chez « PBS » et c’est pas mal non plus. On prêtera attention aux mots autant qu’au son, les deux sont agilement liés. Bilan de compétence (sur ce point, PBS ne craint rien), un brin ironique, lucide et barré, voit juste. Dans le même temps, il dépeint un réel de plus en plus irréaliste. Sales de sport se sertit de sonorités indus, d’un doux tumulte rythmique, presque tribal. Un climat décalé, absorbant, s’extirpe des morceaux. Le chien est un loulou pour l’homme et son électro saccadée, spatiale, se montre clairvoyant. Amer et en colère, une colère à laquelle il donne musicalement corps, Petit Bourgeois Sauvage mériterait, bien plus que beaucoup d’autres, qu’on se penche sur son cas. Château d’os, entre voix diverses et tonalités une fois de plus attirantes, entre susurration et excès également, affirme et entérine l’identité du sieur Marenda.
Ce dernier, extrêmement convaincant, se fend pour finir d’un Angelo doucereux, où voix et trame réduite cohabitent sans tapage. J’ai bien fait de trainer, en ce jeudi matin blafard de teint mais où perce de timides rayons de début de jour, d’errer sur Bandcamp. J’ai trouvé ma matière, j’ai trouvé Petit Bourgeois Sauvage et retrouvé Distag qui fête, depuis hier, ses cinq années d’existence. Une performance! C’est assez pour me satisfaire et, par la même occasion, repaitre mes fréquentes envies de son non conforme doublé de « lyrics » à la verve étonnante. J’allais oublier: le gaillard possède, de plus, un magnifique t-shirt des Thugs. Si avec ça on ne le plébiscite pas….