Désormais basé à Rennes mais né à New York, Denner se compose aujourd’hui de Marc Corlett (bass, drum machine, synth, guitar), Yann Even (guitar), Francois Houplain (synth) et Gilles Le Guen (voc). Après le flamboyant « Nouvelle-Bretagne« , conçu par Le Guen en compagnie d’Adam Humphreys (guitar, bass) et Mike Pate (bass, drums), réédité en juin 2019 dans une formule « Extended », puis d’autres réalisations pas moins attractives, nous en venons à ce 12″ 4 tracks EP ayant pour nom « Dreamless Tribulations« . Le premier d’une série de trois, destinée à voir le jour dans les mois qui s’annoncent. Un bel objet qui plus est, sorti en vinyle chez Meidosem Records, tiré à 300 exemplaires numérotés à la main et porteurs, surtout, de morceau dont les mélodies refroidies, les airs de New Order dans le chant et nappes de synthés dans le vent, basses charnues et guitares redoutables d’efficience, sans graisse en trop, font tout le charme. Je dois la découverte à Parklife, disquaire qui édite aussi un magazine de choix, dans lequel je suis récemment tombé sur l’interview de Gilles Le Guen. S’ensuit donc l’écoute de Dreamless Tribulations, la finesse pop-cold de The Kelp, dans un début déjà charmeur et assez irrésistible, m’incitant de suite à approuver. Un morceau suffisamment acidulé, aussi, pour nous faire succomber. Denner a du nerf, il dégage également une « pimpance » à laquelle il est difficile de s’opposer.
Profitons-en donc, ça ne dure « que » quatre plages et l’évocateur Low Life, fort des mêmes atouts et au sein duquel j’entends des effluves de T21, dans ces ritournelles exaltantes qu’un chant rageur surligne, confirme les vertus du quartette. L’alliage est parfait, la sobriété de mise. On ne charge pas la remorque, on a aussi le bon goût de trancher dans le vif d’élans aériens alertes (le justement patronymé Turbulence) en les dopant à la seringue cold-wave. La voix se module, passe du « venteux » à l’intense, se donne des airs quasi crooner sans se la raconter. La boite à rythmes amène des accents 80’s, à côté de ça la basse poursuit allègrement son travail de groove d’obédience cold. Voilà du bon, sans prise à l’ennui. Le type d’ep qu’on s’enverra compulsivement, dont même le terme suinte l’attraction définitive. Tranquility, qui passe d’une amorce posée à des encarts rythmiquement denses, appuyés, addictifs, avant de retomber dans le climatique, concluant victorieusement en flirtant avec le ténébreux d’un Joy Division.
Dreamless Tribulations, c’est une évidence, a tout pour s’imposer et renforcer le parcours de rennais à saluer. On attend maintenant et de pied ferme les sorties futures, en se réjouissant de voir ressurgir un groupe de cette trempe. L’EP donne l’envie, inendiguable, de danser et chantonner ses textes, et nous replonge dans une ère où le glacé merveilleux de ritournelles poppy enchanteresses faisait foi. Le tout remis au goût du jour avec agilité et en laissant poindre, au bout de l’écoute, des perspectives certaines quant à la tenue de ce qui suivra.