Bacchantes, c’est Amélie Grosselin (Fordamage: voix, guitare électrique ), Astrid Radigue (Mermonte: voix, batterie ), Claire Grupallo (Sieur & Dame: voix, harmonium indien, claviers) et Faustine Seilman (voix, harmonium indien, claviers). Ces dames déjà expérimentées s’appuient sur des poésies anciennes, questionnant des sujets tels l’amour, la nature ou encore la recherche de liberté. Rock de caractère, et chant lyrique, appuient un propos sans détour, classieux mais aussi charnel, que ce premier album éponyme illustre magnifiquement. On est là dans une certaine originalité, parfaite par de nombreuses années de pratique antérieure où pop, noise, lyrisme radical et folk baroque ont fait merveille, venant maintenant nourrir le travail de Bacchantes.
Aride, bien nommé, inaugure un univers insoumis, de lyrisme, donc, et d’intensité dans ce qu’il renvoie. Celui-ci, ici lancinant, se retient et resplendit sur le plan musical, par le truchement entre autres de ses touches d’harmonium. Cavale est issu de la même étoffe, entre soie et bure. Bacchantes, c’est une évidence, impose une identité forte. Fiers tyrans, à la fois mystique et tumultueux, la renforce. Heureux celui qui, en quête de sons et climats à part, aura le bonheur d’auditionner Bacchantes. Dont le lyrisme attrape la fièvre, s’habille de sons qu’on retiendra, et laisse à entendre un produit plus qu’attrayant.
Plus loin, Politique -tout un programme donc, il n’y a qu’à voir le désastre gouvernemental actuel-, grince (des dents?) et met du temps à émerger, brumeux et griffu dans ses guitares, aux riffs crus. Il s’emballe ensuite, on note au passage que le côté lyrique des chants ne leur donne que plus de portée encore. Sécheresse le fait d’ailleurs valoir avec maestria, surligné par une batterie présente et en saccades. Le morceau se durcit, sans se séparer de son élégance. Marine, immuable ou presque et entêtant puisque répétitif, n’est pas mois valeureux. Bacchantes a trouvé un biais nouveau, pour traduire ses idées, qui lui donne du chien. Choeur d’amour, noisy et dépaysant, accentue l’attachement que provoque le quatuor. Hellébore fétide, noise et vindicatif, exalté, l’imite imparablement.
Photos Tessye Lopez
On ne trouvera pas d’équivalent à Bacchantes, sa formule le décale de toute autre référence. Les filles ont le mérite de créer, de défricher, de labourer des terres plurielles. Elles ont le mot, le son, le ton et le nerf rock qui percute leur ouvrage. Rumeurs nocturnes, où les motifs virevoltent et le fond bruisse, amène le lyrisme à son paroxysme. Le doute n’est plus permis, on tient là un projet d’importance. Il ne s’anticipe pas, libre dans son cheminement. Ses références l’élèvent. Terre d’allégresse, uniquement vocal, laisse les chants d’oiseaux ramener la paix dans un monde tourmenté mais passionnant. Dont une seule écoute ne saurait suffire à cerner les contours, car Bacchantes exige l’immersion.
On suivra volontiers l’injonction: elle permet l’exploration de verbes et textures inédites. Ce disque est une aventure, il garantit dans le même élan la rencontre avec un genre innovant. Lettré et rugueux, bluffant sur le plan vocal, Bacchantes, dans une débauche (elle était facile..) distinguée, nous livre là l’une des plus belles surprises indé du début d’année, sans conteste possible.
Bandcamp Bacchantes / Site Figures Libres Records / Site L’Autre Distribution