En 2017 The Big Idea, sextet psyché de La Rochelle, sortait un premier jet cogné du bulbe, phénoménal. Un quadruple album (ne lésinons donc pas) intitulé La Passion du Crime 3 – aux multiples facettes (garage, pop acoustique, rock psychédélique, musique expérimentale et que sais-je encore…) et construit comme la bande-son d’un polar érotique imaginé, qui dépeint le Londres des années 80 à travers l’enquête de l’inspecteur Lawrence. L’ingénieur du son bordelais Stéphane Gillet, tombé sur les bandes de l’opus en question, propose au groupe d’en assurer le remixage et la remastérisation. L’idée, approuvée par la clique, génère une sortie qui se déclinera sur quatre dates, au rythme d’un chapitre dévoilé par semaine à partir du 29 janvier. Je vous en présente donc, ici, le premier, dont l’écoute risque fort de vous pousser à vous fader l’intégralité du bazar. Car ce denier, entre tissu psyché avenant et délires bien plus poussés, plus soniques et cinglés, est un régal. Un pièce majeure qui oscille, tend à se casser la margoulette, mais retombe sur ses pattes et, considérable, mérite toute…notre considération évidement.
Déjà Intro, sur même pas deux minutes, groove en mode jazzy aérien puis, soudainement, accélère singulièrement et gronde sans perdre, au passage, de sa beauté dans l’ornement. Et ce n’est là qu’un aperçu, bien modeste, de ce que peut réaliser le gang rochelais. XXI, d’un début presque tropical avec ses « Dou-you, do-you..Saint Tropeeezzz » lascifs et sensuels, breake pour, en son terme, se transformer en volcan noisy qui érupte de partout. Tout ça comme à la parade, passé l’effet de surprise du aux changements de direction abrupts de l’album.
Allez, LVIII suit une chemin similaire, se faisant poli avant de sombrer dans un superbe bordel chanté et sauvage. Il brise l’élan, excellent, et retombe dans ses formes psyché…brièvement car derrière, c’est à nouveau la poussée de fièvre vocale et sonore. Et le pire, dans cet élixir, c’est qu’il leur va à ravir, à ces agités au talent insondable. XV les présente charmeurs, dans l’union de voix posées et caressantes. Le décor est beau, pulse avec élégance et, pour le coup, tranche de manière moins abrupte dans le canevas paisible des gaillards. Ca part quand même sacrément en vrille, j’en frétille, mais la chanson se « contente » de vaciller sans complètement se déraciner. Du grand art. Alors XVII-02, lui, passe sur des durées très réduites du céleste à des coups de semonce speedés, aux airs rockab’ et surfy bien tarés. Et géniaux. Je jubile, j’ai toujours défendu l’idée selon laquelle le territoire massacré par le freluquet du gouvernement regorgeait de combos de haute volée. Qu’on les laisse jouer, p+++++! Mais je m’égare, LXVI me ramène alors à la (dé)raison.
En 2017
J’en perds..la raison, tabassé, après un massage psyché fleuri et huilé à l’encens, par des montées et cavalcades bien senties. Mazette, les mecs jouent bien, s’ouvrent des portes de sortie qu’ils défoncent, ici, à grands coups de bélier tribalo-noise. Et tout ça, en affichant une classe qu’on se prend en pleine face. La taloche fait du bien: diantre!, sur ce morceau on ne fait que s’écarter des tracés, s’emmancher dans des pistes sans cesses brouillées. A l’arrivée, on signe le premier volet de la bagatelle de quatre parutions. Je peux, par ailleurs, déjà vous le dire: le reste, trois volets, donc, d’une folie salvatrice, est du même tonneau. Raison de plus pour en ouvrir le robinet, il s’agit d’un travail de relecture impressionnant de bout en bout. CII, cuivré, si je ne m’abuse, et déchainé, caracole puis percute la glissière, revient à plus de « sagesse » tout en restant bien massif. Le tour est joué, à la fin du Chapitre 4 ça nous fera 23 morceaux et je précise, histoire de bien situer, que le contenu des 4 épopées livrées diffère de l’une à l’autre en évitant de partir dans l’incohérent. Ceci sans porter atteinte, loin s’en faut, à la qualité d’ensemble.
Remarquable, c’est le moins que l’on puisse dire, La passion du crime 3 (Remix 2021) est une pépite, qui brille et irradie tout en se montrant versatile et explosive, exigeante aussi car en aucun cas rangée. Rendez-vous est pris, il s’agit d’être à l’affut de chaque sortie car The Big Idea, qui vient d’en avoir une dont l’application surpasse toute autre sortie simultanée, vous laissera sans nul doute sur votre séant, tourneboulé par le remix de ce Stéphane Gillet au travail renversant. Zappa, dans l’esprit, n’est pas loin mais The Big Idea lui colle aux trousses en brandissant, tel un atout décisif, son quadruple disque aux conséquences durables et rassérénantes quant au bien fondé de sa mise en oeuvre.