Après un Violence Ultimatum explosif avec Kim Giani et Rotor Jambreks, Jorge Bernstein et ses Pioupioufuckers calment le jeu et changent de nom. Le team reste la même, mais elle remise les guitares électriques pour les remplacer par des guitares folk. Synthés d’un certain âge, mélodica et flûte traversière sont aussi de mise et le rendu, ce disque appelé Jorge Bernstein and The Silky Birds Of Love car ici, c’est à l’amour qu’on aspire, vaut beaucoup. Dans un registre fleuri, mélancolique et d’obédience folk-indé, A school trip to Wales allie voix racée, instrumentation pure et dénudée, flamboyante, un brin ombragée. On est, de suite, plongé dans une atmosphère folkisante aux accents maussades dont s’extirpe, pourtant, une forme de joie. C’est ainsi que résonnent les chants croisés de Baby you’re mine, fine comptine dotée d’un tumulte retenu. Car même dans ses abords adoucis, le trio met de l’intensité, de l’émotion, et tire son épingle du jeu. Pour cela, il s’évertue à rester simple, accessible, sans jamais faire le bavard. 100 maybe brille d’un feu allégorique: je pense parfois, je ne sais pas pourquoi, au Sentridoh de Lou Barlow. Again and again, lent et sobre, confirme que pour le coup, on n’est pas venu chercher des crosses. Le discours est à la paix, il sécurise et incite à s’y lover, again and again…
L’éponyme The Silky birds of love, de ses soubresauts qui, conjugués en mode rock, auraient ébranlé la casbah, développe ce même ton tristounet, communicatif à force d’être décliné sans fard, et cette aptitude à faire dans le juste. On se contente de pièces courtes, une fois que la messe est dite on quitte l’église. C’est le meilleur des procédés pour, au passage, ne perdre personne. Larden #4 a des airs de B.O., son climat « surf au ralenti » s’avère extrêmement attirant. La batterie amène une agitation retenue, qui magnifie le tout et lui donne de la vigueur. Dans le burné comme dans le ouaté, on a devant nous une équipe qui sait s’y prendre.
Another forest, lui aussi flemmard mais doté de vie, sent le vert et l’écorce. Celui des feuilles, celle des arbres ente lesquels le clan de chez Super Apes serait, pour faire valoir ce disque, idéalement situé. Il joue magnifiquement, dans l’économie. Silly song, surtout pas « silly », unit les chants et reste en phase avec l’esprit lo-fi qui anime le groupe. My summer’s gone se vivifie, suivant une cadence plus alerte mais sans tapage. Les chants y sont, à nouveau, pétris de ressenti. Sans larmoyer mais avec vérité, Jorge Bernstein and The Silky Birds Of Love créent un registre chatoyant. Time for rain en accroit le côté…pluvieux, gris et grisant car derrière ces tons désenchantés, on trouve du plaisir. L’album est beau, pur, charmeur et magnifiquement ombré. Il a des faux airs, parfois, de Swell qui aurait -presque- tout débranché. Way to remind en amorce la dernière ligne droite avec beaucoup de pudeur, de délicatesse.
Photo Titouan Massé.
Enfin Western ending, où la batterie amène derechef de l’animation, de l’allant, fait étinceler ses notes. Il clôt un disque éclatant, auquel j’aurais tout juste adjoint, histoire de lui insuffler un surplus de vigueur, une ou deux embardées en plus. Je fais la fine bouche mais Jorge Bernstein (chant, guitare, basse), K. (batterie, flute traversière) et Peter Woodwind (basse, chœurs, chant, guitare [suivant les morceaux…], mélodica, claviers), ce dernier se chargeant également d’enregistrer et de mixer le tout, nous ont fait mijoter un recueil de tout premier choix, embelli pat Adé aux choeurs, tout en se renouvelant de manière surprenante et magistrale.