Phénomène indie-rock venu du Canada, impulsé par Jeremy Gaudet (chant, guitare), Broha Moore (batterie), Mike Walker (basse) et Brian Murphy (guitare) et nouvellement signé sur l’incontournable Sub Pop, Kiwi Jr. sort avec Cooler returns son premier album pour le célèbre label. C’est son second au total, frais et mélodique, aux airs de » fait à l’arrache » qui en renforcent le charme. La société en prend ici pour son grade, à grand renfort d’ébauches poppy ou post-punk débraillées -en apparence- et imparables. Qu’elles se muent dans l’urgence ou exhalent des airs pop à guitares mélodieux et euphorisants, les chansons des Canadiens, après deux écoutes, font frétiller les gougouttes. Tyler fait de suite péter les mélopées, soignées, sur un mid-tempo attirant. Undecided voters provoque la même attraction, en plus d’êtres concluants les Kiwis font montre d’une vitalité qu’on remarquera. Ils vont à l’essentiel, évitent d’en dire et d’en redire. Maid Marian’s Toast souffle une pop-rock charmante et piquante, truffée de sons bien trouvés. Highlights of 100 unit les chants, file et vaut autant par ses voix que par ses notes et accords. A chacun de ses morceaux, Kiwi Jr. trouve le ton juste, l’air qui nous retiendra dans ses filets.
Only here for a haircut, de traits country en chants uni et guitares carillonnantes, vainc lui aussi les résistances. Il ressemble au Pavement le plus délié qu’on ait connu, doté d’un harmonica. Le titre éponyme riffe cru, libère un post-punk sans détours. C’est une collection de ritournelles irrésistibles, comme à la parade, que nous refile la horde d’agités talentueux. Le titre en question est un hymne, simple et efficient à souhait. Guilty party, s’il a lourde tache de lui faire suite, se montre largement aussi réjouissant. Il y a chez Kiwi Jr. une prédisposition à tirer vers le haut, sans avoir l’air d’y toucher, des compositions désarmantes de sobriété. Omaha en fait partie, cela va sans dire.
Cooler returns est un album sans ratés, Domino le voit enchainer sur un rythme soutenu. Les esquisses sonores issues des guitares, la portée des voix qui se rassemblent, la pulpe pop et la chair post-punk de l’ensemble l’emmènent vers l’excellence. Nashville wedding déroule le tapis rouge, p++++n c’est dément, ces mecs-là alignent les titres-régalade comme le faisait un Weezer à ses débuts, avant de se mettre à patauger au point de se vautrer. Ici, on reste fringant: le cap du deuxième support est franchi haut la main. Dodger nous laisse entrevoir la fin des festivités sur une note aussi subtile, dans son décor, qu’alerte dans son avancée. Norma Jean’s jacket glisse, dans ce package à fière allure, sa pop claire et, encore une fois, ornée avec une grosse louchée de savoir-faire. Et de la justesse, là où certains en feraient des tonnes.
Photo Jamie Rajf
On ne s’étonnera guère, dès lors, de la brillance d’un Waiting in line terminal à l’habillage mesuré, dans la lignée d’une jolie cuvée. Si le « buzz » autour de certains groupes, très souvent, incite à la méfiance et débouche sur des projets fadasses, il semblerait bien qu’avec Kiwi Jr. le coup de projecteur soit amplement mérité. A l’écoute, en tout cas, de ce Cooler returns, on est bien loin d’en délaisser les treize plages sans appel, toutes mues par le même éclat redevable à la pop, au post-punk, à un esprit lo-fi qui teinte et réhausse le tout. Excellente fournée donc, une fois de plus, en provenance d’un Canada musicalement fertile.