Sorti à l’origine en mars 2017, le Unnatural Objects and Their Humans de David Boring, groupe de Hong Kong où jouent Laujan (vocal), Jason Cheung (guitar, vocal), Jonathan Yang (bass), Kit Yip (guitar) et Underdog (drums, vocal) fait l’objet d’une ressortie remastérisée via Damnably Records, maison de disques londonienne au panel souvent énervé, très indé, porteur de mélodies qui scintillent dans un doux bruit. L’idée est bonne, elle remet au goût du jour un album turbulent, jamais « boring », façonné par une bande bien plus offensive qu’il n’y parait quand on regarde ses quelques photos. On y traite de l’oppression des jeunes humains par le monde moderne, il est par conséquent logique que le ton soit plutôt virulent. Le crachin noise d’un Jane Pain à la fois lancinant et perforant, où le chant se fait songeur sur lit de nappes bruitistes et de choeurs dépaysants, donne le la. Smog prend le relais, psyché et sonique, saccadé. On sent que le groupe, déroulant un panel ouvert, ne restera pas figé…ni tranquille. Une accélération de tous les diables, brutale et hurlée, s’incruste dans le paysage. Brian Emo (les puristes vont grincer des dents, tant mieux…) suinte quant à lui une douceur trompeuse, qui laisse ensuite place à des soubresauts et coups de tocsin appuyés. Fait de nerf et de bruit, Unnatural Objects and Their Humans ne dédaigne toutefois pas les mélopées. Ces dernières se montrent rugueuses, sous le joug d’un discours remonté.
Machine#1 et son post-punk frétillant arrive, les voix s’y joignent et y font fureur. La basse vient secouer le tout, irrésistible. Ca cogne, ça joue vite. Les morceaux sont bons, très bons. Loosefuck file à toute allure, sa batterie est incontrôlable. Féminité canaille dans la voix, giclées sonores nourries assurent une trame jubilatoire. Le boucan n’offre, pour l’heure, aucun répit. En a peine deux minutes, le pavé est jeté. Men, avec son refrain réitéré, allie les délires sonores des B 52’s et l’attaque puissante d’un Yak. Le morceau est intense, bouillonnant. Machine#2 se montre plus lourd, entre massif et aérien il trouve son assise sans difficultés. Comme dit plus haut, on ne s’ennuie pas: chacun des titres présentés, et reliftés donc, vaut toute notre attention. La chanson se termine dans le fracas, incoercible. La bourrasque rythmique de Susie Exciting, frénétique, en remet une couche. Les bases sont solides, le fatras sonique maîtrisé malgré ses penchants agités. Belle découverte, incontestablement, que cette équipe partie au combat et armée pour le remorter.
On trouve, disséminés dans le disque, des sons affinés. C’est néanmoins la tension, récurrente, qui prévaut. L’union des organes vocaux est également valable, elle ajoute à la furie de l’opus. On n’est pas chez les oursons, l’objet ravira à coup sûr les amoureux du rock noisy. Ceux de la frange insoumise, à l’image des thématiques défendues par David Boring. Qui, le temps d’un I Can’t aussi poppy que volcanique, valide son emprise. Et si, histoire de démontrer qu’on assure sur les planches, on plaçait un live? C’est chose faite avec Suicide Pop (Live), dont le début caresse. Mais après ça, on fait tomber les murs. Diantre, quelle éruption! La scène, de toute évidence, sied à ces cinq là. On aimerait les y voir, une fois que cette foutue période aura pris fin. Le morceau reprend, en sa fin, des atours plus posés, enflammés toutefois.
En attendant ces prestations live, Newborn Porn fait crisser ses guitares, à l’unisson avec une batterie dans la retenue. Un chant rêveur s’invite. L’envolée rageuse s’ensuit, plombée. Chez David Boring (on notera, aussi, l’impact du nom), on s’escrime à grands coups de gattes excitées, de section rythmique en feu et de vocaux criés, à d’autres endroits un peu plus modérés. La recette nous donne, au final, un album calibré, de la meilleure des trempes, à s’envoyer bien fort jusqu’à ce qu’il vous jette dans les cordes. Le tout avec une pincée d’exotisme non négligeable, eu égard à la provenance du projet.