Yes Basketball n’aurait sûrement pas vu le jour si Pierre Marolleau (Fordamage, Fat Supper, We Only Said, MyName Is Nobody, ….) ne s’était pas blessé…au basket. Ce fut l’occasion pour lui, en effet, d’impulser son projet solo. De démos en premier EP jusqu’à la tenue de concerts, le voilà qui nous livre un Goodbye Basketball pas piqué des vers où hip-hop, noise, rock, sons fusants et bagarre entre ton (p)osé et furia sonore se donnent le change avantageusement. Pour l’affaire en présence, Christophe Le Flohic (Totorro), Stéphane Fromentin (Trunks), Benoit Guchet (Bantam Lyons), Ghislain Fracapane et Astrid Radigue (tous les 2 de Mermonte) sont venus lui prêter main-forte. Belle équipée! A l’écoute, le travail collectif impressionne et on pense autant à Deerhoof qu’à Soul Coughing, entre autres noms qui surgissent au gré des orientations. New shit I rappe dans l’espace, se pare d’une batterie qui le secoue et de bruits fugitifs, de voix en choeurs aussi, puis en appui doucereux. Sans plus attendre, Yes Basketball se démarque. Il breake direction le psyché, l’orne de bruitisme divin et d’un bel orage de fin. Your nights and your days, ensuite, riffe fort et balourde une psych-noise possédée aux traits tribaux. Bordel, quel mic-mac savoureux!
On n’obéit, sur ces onze titres, à aucune règle établie. On crée les siennes, basées sur le brassage des genres. Et c’est pas pour faire genre. Joke jokes rappe sur un fond ombragé, se hache et envoûte à son tour. Anger featuring happiness, parpaing scandé, mue après son début en un hip-hop bien dansant, avant de reconvoquer des vagues rock bourrues à souhait. Impressive!, diraient les Anglais. Your eyes talk fait le rêveur, se souille un peu. Soniquement, ici, on fait feu de tout bois. No limits dans la créativité, no limits dans l’effet produit. A tout moment, l’édifice peut voler en éclats sous les assauts noise. On pensera aux Beastie Boys évidemment, pour le « collage », mais aussi à Whale et son excellentissime We care datant du mitan des 90’s. Gotta clik on it fait aussi bien que n’importe quel rappeur. C’est presque du noiserap, truffé de sonorités qui éclaircissent le tableau. Moodie Black n’à qu’à bien se tenir, Yes basketball a tombé le maillot pour enfourcher micro et instruments.
Hairdressing se tapit entre boucles spatiales et voix, presque, de crooner. Ca lui donne du style bien qu’on ne puisse, à l’arrivée, identifier le sien (de style). C’est d’ailleurs là que réside l’attrait principal de l’album. To dream and forget (feat Astrid Radigue) souffle un rap à deux voix, agité. Des bruits tranchants lui portent atteinte et qualitativement, le mettent hors d’atteinte. Les cadences s’entrecroisent, l’instrumentation est aussi merveilleuse que turbulente. Testing the wind, apaisé, explore de son côté des paysages plus lancinants. To get old with her marie rap et guitares guerrières, sur tapis de rythmes assénés jamais inertes. Etourdissant, Goodbye basketball éprouve l’auditeur mais se hissera bien haut dans la hiérarchie des ovnis musicaux du pays. La fin du titre voit les tambours s’intensifier, la galopade gronder jusqu’à sombrer dans un fracas à la Sonic Youth.
J’ai tout dit ou presque, l’écoute en surprendra de toute façon plus d’un. To stare at something wrong la termine d’abord dans la retenue, puis commence à délirer. Batterie puissante, une fois de plus, et décor sonore rude, beau et tourmenté portent la chanson. On vient de s’envoyer une goulée de son bien à part, issu notamment de personnes abritées par des labels incontournables, indé jusqu’à en perdre le souffle; Les Disques Normal et A Tant Rêver du Roi. Ceci étant dit, on n’a plus qu’à remettre ce bazar vertigineux dans nos platines; c’est très certainement l’une des sorties les plus aventureuses qui puissent être en ce moment.