Venu de Tallinn, capitale de l’Estonie, Holy Motors en est avec ce Horse à son deuxième album. Fasciné par l’ouest Américain, le groupe s’essaye avec succès, et magnifiquement ici, à mêler americana, élans rêveurs et chants de sirène façon Mazzy Star (il a sa Hope Sandoval à lui, elle se nomme Eliann Tulve) alors que les guitares, superbes, font dans le rockabilly au ralenti ou dans les effluves blues. Si l’opus démarre sur un galop vivace et splendide, intitulé Country church et taillé dans une americana pure, mélodieuse et veloutée, au léger griffu que réhaussent des six cordes stylées, on opte ensuite pour un tempo retenu. Et la magie opère tout autant, quand par exemple retentit, lascif quoique, au final, suffisamment alerte, l’excellent Endless night. On remarque, le constat est d’ailleurs applicable à chacun des morceaux joués, le soin tout particulier apporté au jeu, la beauté des décors et bien entendu la portée du chant, délicat et mélancolique. Il y a là des climats, une patine ombrageuse, qui font qu’on succombe. Midnight cowboy, de grattes reverbérées aux interventions magiques en voix magnétique, confirme que l’attraction, sur ce Horse, est de taille.
Lorsque survientRoad stars, la dualité des voix magnifie le tout. Sans ornement ou presque, si ce n’est quelques notes enchanteresses, le morceau touche au coeur. Ave finesse, subtilité, en dosant justement ses essais, Holy Motors en arrive à une copie bluffante. La découverte, car c’en est une en ce qui me concerne, est réellement captivante. Le clan a de plus la bonne idée, ça et là, de mettre du nerf dans ses compos (un Matador entre « darkness », velours et coups de semonce riffeurs). Dans un bel unisson, Holy Motors exalte et renvoie un cachet conséquent. Eliann Tulve donc (chant, auteur compositeur), Lauri Raus (guitare), Hendrik Tammjärv (guitare), Gert Gutmann (guitare) et Kaspar Kiinvald (batterie), soudés, font sensation. Il faudrait une « belle » insensibilité pour ne pas se laisser porter, pour résister aux huit titres de Horse.
Come on, slowly porte bien son nom. Nul besoin d’en dire et d’en redire, quelques bribes de chant suffisent, couplées à la magie climatique du reste. Ca me rappelle aussi Elysian Fields, tout ça, pour la capacité à dresser des chapes sombres et d’une belle étoffe, soyeuses et grisées/bleutées. Dans l’économie de motifs, dans une retenue merveilleuse, les cinq comparses troussent une perle qui, bien qu’elle ne comporte que huit plages, vise -très- juste à chacune d’entre elles. Sur Trouble, la cadence s’emballe légèrement, on se fait plus offensif tout en restant feutré. Horse est un disque qui en comblera plus d’un, doté d’un pouvoir de séduction récurrent. Une envolée ravissante ponctue et conclut ce Trouble, on en vient alors au terme de la rondelle. On en ressortira, assurément, renforcé, heureux d’une trouvaille qu’on s’empressera d’aller faire connaitre au plus grand nombre.
C’est à Life valley (So many miles away) que revient l’honneur de clôturer, dans un déroulé bluesy céleste et rugueux, psyché, un digipack qui plaide largement en faveur de ses géniteurs. Je n’épiloguerai pas, l’écoute parlera et ma conclusion tiendra en un seul mot, ou plutôt en une seule injonction aux allures d’ordre péremptoire: achetez ce disque!