Premier album des Lemonheads d’Evan Dando pour une major (Atlantic) en 1990, suite à trois sorties sous estampille Taang! Records, Lovey est aujourd’hui ressorti, par le très louable Fire Records, pour notre plus grand bonheur. Remastérisé et agrémenté d’un live au Wireless, issu du périple du groupe en Australie à l’époque concernée, en 1991 plus précisément, il va réjouir les fans et, peut-être, bien d’autres auditeurs potentiels. Ses morceaux entre mouvance de l’époque (le grungy Balarat qui ouvre les hostilités avec, en son début, des chants d’enfants qui deviennent hystériques), perles pop finaudes mais incandescentes (Ride with me), scintilleries façon REM et rock à guitares hautement satisfaisant (Lil seed), n’ont pas pris une ride, refliftés de manière à, aujourd’hui encore, combler ceux qui feront l’acquisition de l’objet, édité en cd et dans un magnifique double vinyl. Le livret est lui aussi enrichi, en bref tout est optimisé. Half the time prend la suite de l’essai inaugural, il étincèle d’une pop adroitement guitarisée. En termes de mélodies qui restent en tête, Dando sait y faire. Son savoir-faire inonde l’album, très certainement l’une des grosses références de l’ère qui l’a vu naître.
Avec Year of the cat, on affine les contours. Puis c’est la cavalcade, appuyée, qui caractérise la majeure partie des titres signés The Lemonheads. Des griffures profondes relaient les airs pop, soutenus et valeureux. Fire Records, à chacune de ses rééditions, voit juste. Stove, entre pop et rythme punk, renforce le travail d’une formation encore présente actuellement, un poil moins percutante peut-être mais toujours, quoiqu’il en soit, fiable et qualitative. Comme chez un Dinosaur Jr, on passe les mélodies à la brosse à reluire et on les enrobe de guitares épaisses, souvent remontées. Come downstairs en fait montre, on peut tracer devant soi puis ralentir sans y perdre un gramme de pouvoir de séduction.
Left for dead choisit la première option mais encore une fois, les ritournelles ne sont pas reléguées. Le flux rock des compositions les emporte, les malmène, mais elles continuent à exister. Brass buttons, pop-folk aux entournures bluesy, calme le jeu. Magnifique, il illustre la capacité de Dando à relâcher la pression pour nous trousser des petites merveilles. On repart tout de même, passé ce joli moment, à un rock plutôt incisif au son de (The) door. Moins direct que d’autres, mais rugueux, c’est là aussi un effort accompli. Il finit, sur son second volet, par accélérer et finir en trombe, solo sans frime à l’appui. Il est de toute façon rare que The Lemonheads déçoive, ceux qui n’auront pas décroché de leur discographie fournie le savent depuis belle lurette. C’est Untitled, uniquement doté d’un chant féminin narratif, qui conclut ce must.
Vient alors le Triple J live at the Wireless qui commence sans baisser la garde, d’ores et déjà méchant, sur Come back D.A. où les guitares bavent et la cadence galope. Stove fait de même, en live la clique fait le choix dominant d’un jeu sauvage. A song for you se permet tout de même de faire dans la douceur (un brin acidulée), preuve qu’au sein de ce combo on fait bien les choses dans tous les genres joués. Come downstairs, comme sur l’album, va droit au but. Nighttime reprend Big Star (Dando a du goût, ça aussi on le savait) en nous berçant magnifiquement. Year of the cat insiste dans un premier temps sur cette voie, délicate. Mais très vite, il fait rugir les cordes. Ride with me passe ensuite la crème; à aucun moment, ici, on envisage de quitter le navire. L’affaire, rondement menée, prend fin sur un Die right now déchainé, aux airs d’Hüsker Dü qui renforceront l’addiction à cette ressortie précieuse. C’est une coutume chez Fire Records, accoutumé à faire éclore, à nouveau, des pépites du temps passé qui, de ce fait, nous éclatent dans les oreilles de manière jouissive.