Parisien, Onoda est le nouveau projet des membres de Dead Mantra. Il unit Pierre Hamelin, Louis Muller, Antoine Poirier et Thibault Nascimben qui, barrés façon Suuns d’assez loin, mais aussi et surtout » à la eux-mêmes », de manière spatiale et répétitive sans qu’on trouve quoique ce soit à y redire (How could they live in hope qui ouvre ici le bal), mais large, bruitiste parfois, dronisée et flirtant allègrement avec le shoegaze ou l’ambient, se distinguent « grave ». Lands/Islands est le premier jet prolongé du quatuor, cinq édifices de durée étendue en font l’attrait et transgressent sans rougir les règles, s’aventurant en terrain miné mais où, à l’évidence, les acolytes du jour sont parfaitement à leur avantage. Passés par The Dead Mantra donc, mais aussi La Peste et Theda, les gaillards ont du métier et ça les aide à dévier. Le morceau précité les emmène d’emblée très loin, son début psychéise l’auditeur et réitère ses sonorités tombées du ciel, façon Young Gods dans l’effet produit. Chant en rêverie et rythme saccadé arrivent, la capsule prend de la hauteur mais s’envole sous turbulence. On note de jolis bruits, dérangeants/harmonieux, comme chez Yeti Lane. Nous voilà catapultés, à grand renfort de motifs forts obsédants, dans les hautes sphères.
Ca ne fait pourtant que commencer; Land, sur plus de dix minutes, fait son Black Angels, puis lâche des salves sans complaisance. Tout en continuant à planer, on ne sait plus si le rendu est shoegaze, dream, psyché ou je ne sais quoi. C’est du Onoda, conclura t-on. Des drones aussi bruissants qu’ornés de belles notes s’installent dans l’alléchante épopée proposée. Les batailles perdues du quotidien, les regrets et le renoncement sont ici abordés, mais contrairement à ces thèmes le résultat de l’investigation sonore d’Onoda débouche sur des paysages auxquels on s’accroche. Auxquels on se raccroche, même. J’ajoute alors le clan, estimable, à mon plein coffre de trouvailles issues des terres, et du terroir, de France.
Avec Islands 2020, l’horizon se noircit. Ambient, la chanson évolue, à sa moitié, vers un psychédélisme qui dérape. Voix sage, d’ange ou presque, et fond noisy se confrontent à des montagnes plus sereines. Beau et paresseux, voilà un morceau louable en plus, qui ne permettra à quiconque de retrouver le confort d’un espace sécure. Si espace il y a, celui-ci est instable, menaçant parfois, magnifique et orageux. On n’en sort pas comme par magie, on se plaira à y flâner le temps de cet excellent opus. Praypreypray, aux soudaines attaques de six-cordes qui viennent déglinguer sa magnificence, est encore loin du tarmac. Ses fulgurances en drones opaques envahissent son terme, à l’unisson avec des sons qui n’en finissent plus de sonner et re-sonner au point de prendre possession des esprits d’éventuels sympathisants. Fort d’un tel disque, Onoda en gagnera et il serait logique que ceux-ci soient en nombre.
Photo Estelle Bella.
Ils pourront, ainsi, s’abandonner à la longue souillure de The city never gives back, à l’avancée une fois de plus lancinante. On mène sa barque, encore une fois, entre traces sonores, shoegaze cette fois, et voix d’entre les vents. La recette est magique, Land/Islands a le don de capturer la boite à sens et d’oser, continuellement, explorer sans s’y fourvoyer. On se félicite, pour finir et encore une fois, de cette découverte unique, 100% made in France, qui appuie et renforce mon discours, certes récurrent, selon lequel la valeur existe, et prolifère même, au sein de nos contrées et différentes castes musicales.