Polonais, you.Guru fait dans le psychédélisme dont les motifs empilés, la succession de climats répétés, crée une véritable dépendance dès lors qu’on a le courage de s’y abandonner. Exempt de chant, Young Adult Friction est le tout premier album du trio de Bydgoszcz où officient Artur Maćkowiak – guitar, electronics, Michał Lutrzykowski – bass et Piotr Waliszewski – drums. Dans un univers où le loop fait des loopings et les climats groovent dans le ciel, de façon dépaysante pour débuter, suivant une épopée céleste qui laisse des traces (Switch on the Truth), le groupe développe une approche individuelle, qui lui permet de susciter l’intérêt. Sa musique, pensée comme une réponse à l’époque singulière que nous vivons, agit sur le psychisme. De noirceur en trouées de lumière, nébuleuse ou plus acérée, elle fait effet. Elle peut se montrer sereine, lâche du son psychotrope à tout-va, et fait honneur à ses géniteurs en même temps qu’elle se niche dans la constellation, haut, très haut. Jusqu’à, pratiquement, ne plus retomber.
D’humeur changeante, le rendu se répète mais peut s’orienter, soudainement, vers une atmosphère tranchée. Pure nothing capture les caboches, ses sons en vagues prennent possession des esprits. Même si le format instrumental peut déstabiliser, le pouvoir des morceaux est indéniable et si on outrepasse souvent les cinq minutes de durée, c’est pour, à l’arrivée, mieux attirer l’auditeur dans les contrées sonores définies par you.Guru. Une louche de kraut est versée dans la mixture, improvisée, organique autant qu’ électronique, psychédélique donc, aux coups de sang et accélérations qui ça et là boostent les compositions.
An Animated Song, brumeux, finit par s’animer, de manière flemmarde. Un peu comme si, incrédule, on peinait à prendre la mesure de ce « Nouveau Monde ». Les conséquences, une fois de plus, sont mentales. Mais Young Adult Friction purge l’esprit en le mettant à l’épreuve. On réitère, oui, de façon fréquente mais assez juste pour éviter que l’auditeur s’en aille vaquer à d’autres activités. Holy Sand met également du temps à se profiler, mais encore une fois la magie opère. Dans une bulle protectrice, l’album propose un trip bienfaisant. Il est de plus uni, cohérent, vivace sur ce morceau. you.Guru n’est jamais dans le trop, il se fait spatial mais, simultanément, fougueux. Acid Dance souffle une espèce de dub trippant, bien « psych » évidemment, de nature à accentuer les délicieux dommages liés à l’écoute. On y place des sons rugueux, qui déchirent les penchants célestes du titre.
Photo Darek Gackowski
Pour un debut album, you.Guru frappe déjà fort. L’épreuve l’a visiblement inspiré, l’amenant à nous faire macérer les sens dans son chaudron psyché. Ca pulse, la beauté du morceau en question, le bien nommé Acid dance donc, se pare d’élans sereins autant que de sonorités plus brutes. Cosmique et enlevé, le registre de ces trois-là mérite la visite. The Secret Way to Reach Ben, sur le format le plus étendu de la série, y mettra fin après un début à la lente montée. A l’issue, on est à nouveau pris dans un tourbillon saccadé, qui a pour vertu de nous faire adhérer, on n’a d’ailleurs guère le choix, aux salves psyché prenantes des six plages de l’album.