Pour son quatrième album, qui l’inscrit encore un peu plus dans la durée et la qualité, Death Valley Girls garde un cap ouvert, brille vocalement, dévie et finit, comme toujours, par rafler la mise. Under the spell of joy, c’est son nom, livre d’emblée un Hypnagogia obscur et un brin mystique, découpé par le saxophone de Gabe Flores, invité de marque. Le titre est un peu céleste, vocalement, et prend le temps de développer une longue introduction. La tension monte, ça bouillonne magnifiquement. Le morceau se libère, intense, souterrain mais aussi, un peu, barré dans l’espace. Nul besoin d’attendre des heures, Death Valley Girls impose sa marque. Hold My Hand suit, alerte, dans un rock subtil doté de griffures dont on s’entiche. On notera, cela va de soi, la touche féminine encanaillée liée à l’album en présence. Ca compte évidemment, de même que l’accroche variée des chansons servies. Le sax, encore, décore l’effort avec maestria. L’éponyme Under the Spell of Joy m’évoque Gallon Drunk pour sa répétition bourrue, ses giclées de saxo (l’apport est décidément conséquent et, de plus, large), ses riffs qui assaillent.
Au bout de ce trio d’amorce, on est déjà sur les cimes ou presque. On y est certes accoutumé mais ici, Death Valley Girls évolue tout en restant lui-même. On y va, sur le titre qui donne son nom à l’opus, d’une accélération ravageuse. Celle-ci dégage une beauté farouche et conclut puissamment la composition. Bliss Out prend lui des accents 60′, l’orgue le nappe joliment. On le sait et ça se vérifie, Death Valley Girls rate rarement la cible. Ses plages sont en outre souvent entrainantes, et laissent place à des mélopées qui n’oublient pas, fréquemment, de se salir. On met les mains dans la boue, dans le même temps on brille quand on donne de la voix.
Hey Dena, plus loin, amène une touche venteuse, doucereuse bien qu’en fond, on sente la possibilité d’un envol rageur…sans qu’il n’arrive. The universe installe ensuite une trame ombragée, de caractère, aux caresses perverses. Le sax, à nouveau, fait merveille. D’obédience psyché, la chanson se souille au fur et à mesure de son avancée. C’est une évidence, les filles de Los Angeles sont plus que jamais en forme. It All Washes Away accouple chant de choix, rock qui perfore et, récurrente sur le disque, légèreté rythmée. Ca prend parfaitement, ça twiste aussi un peu (Little Things, de haute tenue à l’instar du reste). Le rendu est racé, rempli de sons qui déclenchent un vif plaisir. Chez Suicide Squeeze, label à recommander, on sort du solide, toujours. Under the spell of joy, parfait, « orguisé » et élégamment offensif comme on aime (10 Day Miracle Challenge), complète le catalogue avec brio.
On en vient à ce moment au duo de fin de ce brillant recueil. I’d Rather Be Dreaming convoque des notes bluesy, il prend l’air et se perche. On combine très bien, sur Under the spell of joy, propos posé -en apparence- et rythme soutenu. On injecte, quand il le faut, du nerf, décisif. L’essai est équilibré, jamais ennuyeux. Au contraire, son intérêt est constant. Sans être dans un rock dévastateur de bout en bout, auquel on préfèrera apposer nuance et variété, on parvient à s’extraire de la masse. C’est d’ailleurs un morceau modéré mais appuyé, aux excès estimables, qui met fin aux festivités. Dream Cleaver finit donc dans la modération en laissant, toutefois, la porte ouverte à d’éventuels écarts, une rondelle qui confirme largement les dispositions du groupe emmené par Bonnie Bloomgarden.