Après 2 ep’s qui firent craindre le pire à ses éventuels opposants, Tapeworms débarque à nouveau avec un album, cette fois, qu’il nomme Funtastic. J’ai déjà le désir de le rebaptiser, de substituer un « a » au « u » tant le trio lillois, doué, magnifie son shoegaze qui sonne un peu comme si My Bloody Valentine avait mis du sucre -salé- dans ses nappes bruitistes et avait éclairci ses plages ambient psychotropes. On retrouve un chant à la Bilinda Butcher, rêveur, un peu mutin, qui charme et, suite aux bidouillages électro de Next time (maybe), qui mettent en joie, se couple dans le coton à un organe vocal masculin. On se plie déjà, avec grand plaisir, aux dérapages éthérés des habitants du Nord. On n’a de toute guère le choix, il nous en servent jusqu’à faire péter nos panses en transe. Safety crash, alerte et crissant, en remet une louche. On retrouve comme sur Loveless, des bruits ingénieux. Et puis ces trois-là, ils te servent du trésor 90’s plein ton auge. Ils savent, aussi, nous faire songer et dodeliner de la tête dans le même temps (un délicieux Dog concern). Avec leur air de ne pas y toucher, derrière leur dégaine de jeunes innocents gentillets, ils cachent un savoir-faire qui pourrait les mener loin.
Soba s’amorce de manière moins urgente, mais tout aussi captivante. Il s’assombrit, ses bruits grincent soudain. Margot prend une voix d’enfant: mazette, c’est juste trop beau. Lascif, le morceau est un délice, meilleur que du pain d’épice. Crush your love, qui fait son Loveless encore, à moins que ce ne soit son Isn’t anything, démontre que chant faussement naïf et élans soniques peuvent faire bon ménage. Il y a chez Tapeworms une délicatesse impétueuse, un sens du dreamy accrocheur, qui incite à répéter l’écoute de ces dix titres majestueux. On place des petits breaks, réussis, parce qu’on n’est pas des cakes, puis le bruit harmonieux reprend les commandes. Smiling through it all, court, expérimente mais trouve trop vite son terme.
Qu’à cela ne tienne, Palm reading joue avec les sonorités, dévie bien sûr, et bénéficie d’encarts acidulés. Tapeworms est ludique, on sent que le groupe s’amuse, mais pensé et conçu avec une foutue dose de dextérité. Il nous offre, fréquemment, des bruitisteries de toute beauté. L’éponyme…Tapeworms justement, passé son intro électro-shoegaze loufoque, prend la direction du deuxième genre cité, option excellence définitive. Vocale et sonique. L’orage se calme, des sons charmants lui font suite. Ca défile vite, quand c’est aussi bon. Round and round arrive et il est presque temps, déjà, d’en finir avec cette décisive rencontre. Sur cette chanson, c’est la rêverie qui domine. Mais elle gronde, greffe du rugueux à sa voix. Enchantement continuel, Funtastic est un sans faute. Sans discontinuer, il nous injecte, dans les veines, une drogue musicale saine et permise. Recommandée, même.
Le dernier shoot, ave ce Alternate ending parfaitement posé entre le doux et le courroux, doté de dérives noisy d’il y a 30 ans (et oui…), ferme la marche et franchit la dernière…marche sans que Tapeworms, lui, ait buté dessus. Son album met du baume, il pique aussi un peu, engendre un boucan aux excès digestes. Une vraie pépite, Edith,qu’il nous tarde d’entendre sur scène dès lors que les circonstances le permettront. Margot Magnière, Eliott Poyer et Théo Poyer, retenez leurs noms, vous assailliront dans la grâce, dotés d’un arsenal solide et indocile.