Si j’ai pu voir Eiffel, le groupe de Romain Humeau, à deux ou trois reprises en live, je sais bien peu de choses de ses efforts solo. Echos est le premier album, le concernant, qui me parvienne; au vu du parcours du bonhomme, fourni (outre le fait de chanter bien évidemment, notre homme est auteur-compositeur, producteur et multi-instrumentiste), je me devais de lui accorder une écoute impliquée. Je remarque par ailleurs qu’Hugo Cechosz, issu des Twin Twisters dont j’ai à maintes reprises suivi les lives endiablés, a enregistré le disque. C’est déjà un bon point et l’objet, qui louvoie entre les genres tout en gardant un cap rock large, ne met pas bien longtemps à convaincre l’auditoire. S’il débute dans une certaine douceur, élégante mais qui fait craindre la trop grande récurrence d’essais polis (l’éponyme Echos), on note que le verbe du bordelais est bien loin de s’être dilué. Le morceau introductif s’enhardit sans, toutefois, réellement décoller. Mais son piano et sa fin plus « frontale » en font un bon début, que confirme Cherry gin. Eclectique dans son quotidien, Humeau l’est tout autant sur ses supports. ici, il touche à la pop d’un The Auteurs, avenante mais bien troussée.
Le bonhomme, de plus, raconte des histoires auxquelles on prêtera l’oreille. P’tite faille dans l’espace continuum temps, rock et direct, a le verbe amer. Ca réussit à Romain, particulièrement à son aise quand il s’agit de faire rugir son manche. Le titre offre une « accalmie » un brin funky, puis repart sur un registre rock bourru. On s’en réjouit, ça met du nerf dans ce Echos qui s’annonce accompli. Tryin’ to be a girl, racé, à la lisière du rude et d’une belle patine musicale, fait lui aussi ses preuves. Dans une retenue qui finit par gagner l’adhésion, on continue, donc, à oeuvrer sans s’y fourvoyer. Des choeurs légers bordent la chanson, dont la fin prend une tangente plus hardie.
Tout ça donne la nette impression que Romain Humeau, quoiqu’il entreprenne, sonne juste. Sauve-toi, sauve-moi est rock, cru et typé. On est dans la protest-song et là aussi, on sait faire. C’est même la source, ce mot militant, de bon nombre de compositions signées de l’Aquitain. Mais quand le discours se délie, comme sur Odyssée qui prend des tentes jazzy, le rendu demeure crédible. En homme d’expérience, de goût et de passion, Humeau brasse large, mais s’en tient au final à un éventail pertinent. Avec Vagabond, il sert une pop-rock griffue, mélodique et entraînante, à la qualité affirmée. Une fois de plus. En mariant des trames bien faites avec une plume à l’encre volubile, il donne de l’allure à ses créations. La fougue n’en est jamais exempte, c’est une certitude, mais Echos est aussi un album musicalement rutilant. Notons d’ailleurs qu’ici, Estelle Humeau -la compagne de Romain-, Nicolas Bonnière (Dolly, Eiffel) et Joseph Doherty, entre autres, sont de la partie. Gage, sans aucun doute, d’exigence et de quête de la qualité, ceci dans un cadre familial.
Sans trop en faire, en plus, l’opus finit bien. Pretty girls in a B.W.W se pare d’un débit presque hip-hop, il valide la largesse du répertoire aligné. Ses guitares de choix, ses sons dansants, voient Echos amorcer sa dernière ligne droite avec un certain panache. Humeau est un musicien, un vrai: de ceux qui, leur vie durant, se donnent à la Musique. Ca s’entend, ses contenus reflètent joliment son investissement. L’art de la joie, pour finir, m’évoque autant les Little Rabbits que French Cowboy, entre gimmicks addictifs et allant rock qui fait hocher, et opiner, du chef. Là où beaucoup finissent dans l’ennui, poliment, Romain choisit de se faire frontal. Ce faisant il fait bien, comme partout sur ce Echos plaisant sans discontinuer.