Après nous avoir grandement -et de manière enthousiasmante- désorientés avec son album éponyme, en octobre 2019, le Bantou Mentale de Paris et Kinshasa remet le couvert avec un sept titres qui succède lui-même à Mentale Zombie, deux titres paru en janvier de cette année. Congo Animal, c’est son nom, présente à nouveau une mixture épicée, relevée aux saveurs d’Afrique et frappé du sceau de l’ingéniosité dans le malaxage musical. C’est par le titre éponyme que l’agitation trouve ses premiers soubresauts, entre drum’n’bass, chants de là-bas et acidulé de traits tribaux. Le bazar est dur à qualifier, en revanche l’écoute à coup sûr fera son effet. Trépidant, le morceau met déjà Bantou Mentale à l’écart de tout genre connu ou conventionnel. Le funk électroïde de The forest meets the disco queen, ondulant, groovy, nous en met à son tour plein les jambes. On danse, proche de la transe. Un brin…disco aussi,comme son intitulé le laisse deviner, le titre se pare de motifs récurrents qui le font voleter. Sur plus de sept minutes, on bouge les épaules, porté par un genre nouveau. Il est nécessaire de s’en imprégner, le brassage est osé.
Mais Bantou Mentale, une fois dompté -c’est un animal-, squattera ton salon. Kosala, électrifié, hanté et secoué, saccadé, laisse échapper des scories psyché, dub aussi. Sur scène, on imagine déjà l’étendue du registre, les corps en sueur gigoter jusqu’au terme du set. Moto, sous l’impulsion de vagues électro tordues, dark, enfume la psyché. Tribal et brumeux, psychotrope, il assied l’emprise de Bantou Mentale. Aucun chant fou ne l’étaye; ce n’est rien, il se suffit à lui-même. On en arrive ainsi au mitan du disque, envoûté.
Arrive alors Anakonda, séquencé, fait d’une multitude de sonorités inexplorées jusqu’alors. Musique d’Afrique, son d’un Paris multi-culturel mais, surtout, effluves d’ici et d’ailleurs confèrent à Bantou Mentale une identité forte, reconnaissable après toutes ces sorties significatives. Mbonka terra n’est pas plus identifiable, quoique…si: c’est, en fait, du Bantou Mentale! Des traits rock bluesy bien wild sortent de la marmite, débordante. Ici aussi, des retombées psychédéliques mettent les cerveaux en grande difficultés. Sur plus de sept minutes, à nouveau, on se fait posséder, capturer. Extirpés de nos repères, on peut s’y perdre mais l’accoutumance guette, démoniaque. C’est à Mentale madness que revient l’honneur de fermer la porte d’une jungle musicale dont on n’a pas fini de parcourir, de liane en liane, les recoins sonores.
C’est sur un ton électro fusant, émaillé de secousses de percus, que l’instrumental trace sa route pour nous laisser hagards, pantois, au bout d’une écoute qui se verra suivie de nombreuses autres, dans le but de s’enivrer d’un bouillon innovant mais aussi, dans un premier temps, d’en saisir toute la teneur et d’en maîtriser la composition. Au terme de l’investigation, on ne pourra en ressortir entier, intact. Bantou Mentale aura posé sa griffe, acérée, sur une mappemonde musicale bigarrée et audacieuse, et sur nos cerveaux délicieusement tourneboulés.