Groupe de Nanterre biberonné à la lo-fi, Chiens de Faïence a été fondé en 2014 par Boris Cuisinier et Harmonie Aupetit (guitare, basse, chant). Malo Vannet (batterie) les ayant rejoints, des démos sortirent et à l’heure d’aujourd’hui, un deuxième album voit le jour, succédant à No Reason (Hellzapoppin Rds et Royal Calin Rds), enregistré et mixé par Jaromil Sabor dans le salon du groupe et sorti fin 2017. Si on assistait déjà, sur le disque en question, à « l’élagage » du registre, à son enrichissement instrumental aussi, on reste clairement dans un répertoire sans trop de plumes, réduit à une simplicité que le nombre élevé de morceaux probants porte vers les cimes. Les trois acolytes font de plus, ici, tout ou presque. Seul Mikey Young (Eddy Current Suppression Ring, Total Control) a masterisé l’objet, qui débute par un Ice cream folk/lo-fi à la basse rondelette. En choisissant de ne pas trop se polir, en recourant à des sons qui m’évoquent…Pavement, à des voix aussi angéliques qu’un brin mutines, les deux hommes et la dame partent sur d’excellentes bases. Moldy Peaches et Beat Happening ne sont pas loin; Chiens de Faïence, sur The road, en reproduit les mélodies sucrées, « salopées » avec soin. Sensible et « dirty », il va, l’écoute le laisse déjà présager, nous laisser un disque supérieur.
Talk about you, où Harmonie fait parler son prénom, est une perlette. L’euphorie mélodique gagne l’auditeur, conquis par les ritournelles de la formation hébergée par trois labels incontournables. Avec Dans de beaux draps, les guitares font du boucan, le chant emprunte à notre langue-mère. On y reste volontiers, dans ces beaux draps. Il y a un peu, dans ce morceau et quelques autres, du Diabologum des débuts. Foutraque, Chiens de Faïence reste pourtant très cohérent. City tour, folk et ombragé, pousse plus loin le champ d’action du trio. Curved legs, rêche et urgent, louche vers le punk de par sa vigueur.
On ne s’ennuie pas, on aimera ces gens-là autant dans leur penchants offensifs que lorsqu’ils unissent leurs organes et jouent avec les sonorités d’ornement (un superbe Triouzoune blues). On est foutrement bien avec eux, Chats gris joue un post-punk léger aux synthés « super » façon B 52’S. « Laaa nuit, tous les chats sont gris« , se surprendra t-on à chantonner bientôt. Unmarked on the side, entre vivacité et vocaux encore une fois enchanteurs, nous le prouve de façon définitive: l’artisanal, en musique, permet d’édifier de solides édifices sans aucun artifice. Whispered words brille et scintille, ses voix associées en font un titre en or. Il accélère en sa fin, venant perturber un train-train plutôt peinard. C’est aussi ce que fait Pimples nation, à l’écoute duquel je songe aux Violent Femmes. C’est dire, vu le parcours de Gordon Gano et consorts, combien Fail & Foil est bon. Echo head, tellement trop beau, transformant ce « bon » en « merveilleux ».
L’opus livre de plus quatorze titres au total, généreux et accompli il est. Les temps remet le « french » au goût du jour, souffle une pop avenante et doucereuse. Essaye de t’ennuyer, j’te parie un Chien de faïence que t’y arriveras pas. La fin souillée de la chanson, à la manière de Malkmus et compagnie, amorce la fin de la party sans faiblir. Hidden house, avec son étoffe folk splendide, sur lit de voix alliées et de soudains excès, finissant dans la magnificence un Fail & Foil tout juste magistral.