Mythique paire angevine, le Hint d’Arnaud Fournier et Hervé Thomas nous fait la divine surprise, pour la rentrée, d’un précieux disque de neuf raretés, enregistrées entre 1995 et 2010. On l’y voit collaborer, souvent, avec Portobello Bones, autre combo agité issu de la même ère, et dépayser à souhait, dès ses premiers instants, ceux qui auront la chance de se procurer l’objet, destiné à sortir en vinyl et en numérique. The fish and the fisher, dans un climat orientalisant obscur et racé, nous extrayant de nos repères pour un premier trip à la Hint, au sein duquel les deux multi-instrumentistes élaborent une trame maison qu’un chant typé renforce. Si on reste, pour le coup, dans une retenue d’ampleur, une pelletée de coups de semonce sans appel suivront très vite. Pour l’heure, les élans free de l’amorce nous transportent. Trafics, ensuite, poussant plus loin encore la plongée dans des cieux gris et jamais tranquilles, qui s’animent sous l’effet des cuivres et de sons dont Hint a le secret. Un chant aux consonances…tibétaines, c’est en tout cas ce que j’entends, venant élever un morceau aussi céleste que massif, aussi sonique que soigné. Et qui, sur sa fin, se débride complètement sans quitter ses abords spatiaux.
Déjà malmené -on y prend un vif plaisir-, on aborde ensuite les trois titres en compagnie des Portobello. Hod, reprise de Distorted Pony, se livre sans retenue à une escapade noise hurlée, riffante, truffée de sons qu’on n’entendra pas chez Goldman. Court et puissant, c’est là une taloche qui imprime des traces, sanglantes. Alleged, reprise d’Unsane, prenant après cela la même voie, frontale, au sortir d’un début plus feutré, de nature comme nombre de morceaux signés Hint à engendrer un voyage prenant. La galette n’est pas de tout repos, on s’en doutait à l’avance et c’est ce qu’on vient de toute façon quérir. Sixed, cover de Guzzard en mode punk-hardcore qui cloue l’assistance au mur et lui assène une nouvelle raclée salvatrice, clôturant le chapitre vécu avec les tourangeaux militants.
Alors Diagonal (avec Daunik Lazro), libre et d’obédience jazzy, cinématographique option « film d’angoisse », vient bruisser et étendre le trip. L’entrelac de cuivres brode des trames inédites, qui se passent de chant sans que cela occasionne le moindre dommage. A Hint of 1989 (avec Gran Kino), entre électro anormale et envolées sonores suivies de trouées sereines, crédite ensuite le duo et son choix, récurrent, d’oeuvrer de pair avec des artistes à l’esprit similaire. Il ne s’agit surtout pas de sombrer dans le confort, de s’adonner à des travaux communs. Alaska’s polaroïd lance une forme de trip-hop aux sonorités géniales, pas loin de l’indus, qui fait mouche et éloigne encore un peu plus nos amis déviants des répugnantes rives du mainstream. Hint ne se définit, pas ou plutôt, c’est l’écoute qui nous permet de l’appréhender.
En fin de parcours, Wu-wei reloaded voit Al Comet, des Young Gods (on n’est décidément pas entre gens rangés) télescoper ténèbres et effluves célestes perchées. Très psyché, la relecture s’avère digne des investigations sonores de l’Helvète et son groupe qui, depuis la fin des 80’s, n’a de cesse de défricher. C’est également, ici, ce que fait Hint, pour un résultat bien évidemment au dessus de tout soupçon. Rareties of two centuries, bien que restreint en nombre de morceaux offerts, se hissant à un niveau d’accroche dont ses géniteurs ont su, en leur temps, nous gratifier de manière fréquente et imparable. Notons par ailleurs qu’outre cette rondelle insoumise, Hint prévoit, comble de la joie, quelques dates à partir de la fin septembre.