Amienois déjà distingué en ces lignes, habitué aux sorties classieuses et d’un certain cachet, François Long est un routard du rock, de ceux dont on sait qu’ils font et feront tout bien. Appuyé par de fins limiers de la scène amienoise, il sort en ce mois d’août un Breathe dont émanent, comme à l’habitude, des relents de Bowie portés par une belle inspiration. On ne tarde d’ailleurs pas à mordre, Blind landing inaugurant les débats de manière affirmée, dans un rock pénétrant qui, après un break, se fait plus prog, plus spatial. On est là dans des sphères 70’s, dont Long a le secret et qu’il maîtrise de bout en bout. Un équilibre se crée entre l’acéré et le plus finaud, au terme du morceau les deux se rejoignent d’ailleurs. La touche François Long, dans nos terres, est quoiqu’il en soit reconnaissable. Let your groove on est un régal de rock élégant, rude dans son attaque, un brin funky. K. Fleury et Pierre Scalabre s’y collent, le morceau renvoie aussi des motifs 80’s et un groove imparable qui démontrent que chez le sieur Long, bien peu de choses incitent à décrocher.
Inner circle, ainsi, s’aventure dans le cosmos, se donnant des accents futuristes. Puis, plus frontal, il suinte ce rock maison parfaitement troussé. On note, outre la valeur des compositions, le bon goût dans l’ornement, dans des arrangements qui, s’ils se veulent élaborés, ne perdent personne en route. Love goes wrong, où réinterviennent les deux soldats de la six cordes nommés plus haut, fait dans la retenue. Du rock, simple et de belle facture, à la croisée de l’organique et d’un synthétique bien disséminé.
Sur sept titres au total, c’est là le seul bémol qu’on pourra lui attribuer, Long fait du -très- bon. Un peu plus même, ses créations tutoyant fréquemment le niveau des références auxquelles elles pourraient renvoyer. Offset of 8 est une épopée spatiale qui, passé son début, s’anime et semble émerger avec peine de cieux troublés. Suffisamment éloquent pour se passer de chant, de l’organe typique de notre précieux artiste, il « emmène » l’auditoire. The spark, fait de vivacité rythmique et d’un entrelac de motifs séduisants, valide la posture entre tranchant et cosmisme qui fait la teneur de l’opus. Il s’envole, paré toutefois de riffs cinglants. Earthling, me dis-je alors, prêt à dégainer l’objet de mon étagère. Mais l’écoute n’est pas finie. Il semblerait qu’une fois de plus, François fasse foi. Et l’unanimité, aidé en cela par Béranger Nail au mastering, Charles Lagueritte à l’enregistrement des batteries (jouées par Philippe Leteissier) alors que Ludovic Leleu s’est chargé pour sa part de la photo illustrant la pochette. Pour le reste, mister Long fait tout seul, sans tapage ni ratage.
C’est également une pointure locale, Hervé Mabille, qui vient perler Breathe, le titre éponyme à qui il revient de finir le boulot. Diantre!, François a fait le choix, pour cette terminaison, d’une plage de plus de onze minutes. Celle-ci débute dans le feutre, puis installe ses envols prog. Ceux-ci sont plein de vie, conçus agilement. Là où certains groupes nous noient (tantôt dans l’ennui, tantôt dans le démonstratif), ici on reste à flots. Puis l’incartade rugueuse, toujours, guette. C’est aussi ça qui, au beau milieu d’élans célestes de choix, fait qu’on aime ce Breathe probant et abouti. J’y aurais tout juste, en ce qui me concerne, adjoint un morceau directement sauvage, rock’n’roll et débridé. Je fais la fine bouche, avide de rock furieux que je suis et resterai. Breathe est une réussite à l’éclat continuel, qui peut rugir comme se nuancer, faire le beau comme du plus sale. François Long et sa fiable équipe, on n’en attendait pas moins, nous troussant donc un disque à acquérir sans tarder, valorisé par son approche délibérément locale et une brochette de morceaux dénués de tout recoin douteux.