Déjà démarqué par son No mercy for love (mars 2017), puis un Not easy to cook tout aussi barjot (et addictif) en novembre 2018, Cannibale s’appuie sur le Disquaire Day pour nous sortir, avec comme base son « garagexotic » groovy et délirant, un EP où 3 versions d’une seule et même chanson, complètement renversante, nous catapultent la machine à (décom)penser. Petit Orang-outan EP, l’objet ainsi conçu, s’amorce au son d’un rythme tribal, d’effluves de la jungle et d’un groove diabolique, entre kraut et bruits d’ailleurs (Petit Orang-outan (7″ version)). Ca dure plus de quatorze minutes, c’est funky et acide, ça sue la classe d’un Bikini Machine, c’est musical à souhait et le trip, poussé très loin, ne laissera personne redescendre. S’appliquant à se montrer indéfinissable, Cannibale est ici sur son territoire de prédilection. On prend des salves 70’s de plein fouet, virevoltantes. Un break arrive, une voix narrative y prend place et stimule à son tour la boite à rêves. Puis ça repart. C’est psyché, mélodique mais impétueux.
C’est Cannibale. Il t’invite à son bal, celui-ci n’ouvre pas ses portes aux trous d’balle écoutant du mainstream à l’odeur de fiente. C’est la caste déviante, en premier lieu, qui y est la bienvenue. Ceux dont les oreilles, ouvertes et bien éduquées, s’offrent toutes entières à l’audace. Les chants à l’ensemble parfait font merveille. Une seconde « coupure » survient, le chant y réitère son intervention « off ». Lui succède une embardée de toute beauté, d’une quiétude funky qui enfante ensuite une forme de dub totalement réjouissant. Cannibale n’a pas d’égal, son titre-phare est un régal.
Sa version anglaise, Little Orangutan (English version) donc, nous maintient dans les mêmes sphères, perchées. L’inspiration, la fièvre créatrice, est à son summum. Cuivres free et percus filantes, recours à l’Anglais, sons dingos et géniaux, tout ça entre en collision. Le choc est décisif, le rendu ondulant et indolent, percutant et impressionnant. Nicolas Camus : chant, Manuel Laisné : guitare, Gaspard Macé : claviers, Antoine Simoni : basse et Cyrill Maudelonde : batterie, complémentaires dans leurs bouffées délirantes, leur schizophrénie sonore, poussent le génial vice jusqu’à étirer encore un peu plus leur « track », dont l’Extended version de 19 minutes clôture l’ep.
Comme attendu, l’effet significatif déjà ressenti s’y accroît et s’embarque de plus dans des recoins cosmiques brumeux. Le « garage exotique psyché de la cambrousse » de Cannibale, une fois de plus ébouriffant, fait mouche et ne laissera personne dans le confort. Il dépayse à sa guise, invente un genre peu commun, crédible car attrayant et inhérent, déjà, à plusieurs sorties toutes aussi captivantes les unes que les autres.