A l’annonce du split entre ces deux formations atypiques, m’est venue cette pensée: peut-on rêver meilleure association? Voyez donc; d’un côté Hyperculte, duo suisse « experimental transpop/kraut » et de l’autre la paire La Jungle « from Belgium », tout à la fois noise, math, jungle (si si) et très…La Jungle. Difficile, en termes de zik décalée, de faire mieux. En outre Jim et Roxie, ils en expliquent les raisons plus bas, fondent leur propre label et il s’agit donc là de leur première sortie. Un carton donc, d’entrée de jeu. On était en droit de l’attendre, la barre est placée très haut; Hyperculte, où siègent Simone Aubert (Massicot, jmenfous) : drums / voice / effects et Vincent Bertholet (Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp): double bass / voice / looper / effects, quitte les starting-blocks au son kraut fulgurant de La qualité du jour. Ils foulent la piste en mode tribal, l’équipage décolle et fait des loopings entre les planètes. La voix se répète, déblatère et vire psyché, l’homme et la femme se complètent dans cette embardée aux forts relents cosmiques sur fond de réitération kraut. On est, une fois de plus, transporté et l’incidence est d’autant plus prononcée qu’elle se décline, pour le coup, sur quasiment dix minutes. Kosmischekraut, dirai-je donc, si j’étais Munichois. La qualité (du jour) est optimale, on trouve de plus sur ce titre des sons tels que les Young Gods, compatriotes culte d’Hyperculte, aiment à les jouer. Le groupe pousse sa démarche habituelle plus loin encore, il se transcende. Et vas-y que j’te lance une trouée bruitiste, qui subitement laisse place à cette pulsion kraut entêtante. Avec, derrière et tout aussi prenants, ces sonorités spatiales perchées.
Inconcevable, inenvisageable, d’en ressortir sans dommages. Hyperculte honore les débuts d’ Hyperjungle Recordings avec un foutu brio. Les deux tenanciers, on l’a compris, ont visé juste en s’associant avec les Helvètes au registre insoumis. On s’en réjouit, mis à l’épreuve par cette première salve imparable. On tente de retomber avant que La Jungle, qui a eu le bon goût de laisser ses acolytes ouvrir le bal, fasse à son tour la démonstration qu’à tout moment, sa mixture virevoltante peut elle aussi nous emmener dans d’autres recoins, nous tabasser sans qu’on puisse s’y opposer.
C’est parti donc, A night in Pangea ne ménagera personne. Ses boucles introductives, sa batterie tribale, trippale, imposent une cadence infernale. En décor, des sons fous, inédits, faits maison, inhibent notre contrôle. Les corps se désarticulent, nous voilà pris dans une danse, comme en live, irraisonnée. La voix, tribale elle aussi, mystique à la Swans, y adjoint son grain…de folie bien sûr. C’est un peu jungle ce bazar; on a le sentiment, comme avec Hyperculte, que La Jungle repousse les limites de son terrain sonore. Vocaux déviés, krautnoise des plus trépidant qui puisse être et versants célestes génèrent un morceau qui débouche sur un constat sans équivoque: sur ce Split et en seulement deux titres, les deux combos alliés et fous à lier frappent plus fort que d’autres sur un EP de cinq ou six titres. Qui s’en étonnera, après tout? On s’accoutume vite, avec ceux-là, à du très lourd et ce, de façon récurrente. Victoire à plate couture, donc, pour les deux belligérants à l’arsenal fourni.
Pour compléter cet article et revenir sur la genèse du label et ce qui reste à venir, La Jungle répond de plus, ci-dessous, à ma question du jour:
Pourquoi ce label entièrement « perso » et comment voyez vous 2020, année « bouchée » s’agissant du live, en termes de parutions discographiques?
A la base, on a créé ce label précisément pour la sortie de ce Split. On s’est dit que vu qu’on partageait les frais avec Hyperculte, autant créer un structure sympa.
Hop, un ptit nom, hop un ptit logo et le tour est joué !
Je pense aussi que 2020 a influencé cette création, car nous avions prévu de finaliser 5 sorties cette année. Parmi celles-ci, le repress de « 1 », le Double live et donc ce Split. Je n’en dis pas plus pour les deux autres, mais l’une des deux est déjà en cours de production et l’autre sortira sur HYPERJUNGLE. On a toujours pris en main un maximum de choses avec le groupe, le label n’est par conséquent qu’un prolongement logique à notre manière de travailler.
Donc en termes de sorties discographiques pour 2020, on a la chance d’avoir prévu dès 2019 le planning. Du coup, on est bien occupés. On rentrait du studio le 13 mars, on a tourné le clip de The Knight The Doom le lendemain. Puis c’était lockdown. Tout juste quoi. On a énormément de dates annulées effectivement, mais on a de quoi s’occuper fort heureusement. On a repris les répètes. On bosse déjà sur des nouveaux trucs mais ça sera pour fin 2021 😉
Quand a la reprise des concerts, on verra. Mais si les avions redécollent, pourquoi pas nous:)
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