Connu des « vrais » pour s’être illustré avec Welcome To Julian, dont j’ai le Never so close et le Surfing on a T-bone à portée de main à domicile, dans les 90’s, Lionel Beuque a depuis enfourché le cheval solo, sous l’estampille LB GooDsoN qui lui fut inspirée par Nick Cave. Quelques sorties ont déjà vu le jour et on doit celle-ci, la première sur un format étendu, à Bertrand Béril. Ce dernier est à la tête de Discotica Records, label associatif basé en Corrèze et abritant un disquaire pro, lui-même, dont il importe de piller le stock de rock. Tiré à 100 exemplaires dont j’approuve d’ores et déjà les acquéreurs, l’objet est la 5ème sortie de la dite structure. LB pour Lionel Beuque donc, Good à double titre: pour le fils, donc Son, qu’il est (turbulent cependant et on s’en réjouit au moment de passer à l’écoute), pour son…Son aussi, qui balaie un spectre large reminiscent de nos 90’s favorites. De fait, il va sans dire qu’on tient là tous les ingrédients pour cracher une sève de choix. On est d’ailleurs vite servi; Casanova…séduit, magnifique dans sa noisy-pop à la voix un brin paresseuse, un tantinet british. Il y a du Mary Chain dans l’amorce, qui nous sert des ritournelles-mirabelles, sucrées et poppy, dont on tendra à se gaver jusqu’à l’indigestion.
En dopant sa recette à la gratte qui gronde, LB GooDsoN démarre en se plaçant, de suite, en pôle position. Une pincée de cristallin, une louche de bourru, le tour est joué et on ne demande qu’à ce qu’il perdure. Sunshine 25, entre voix de crooner canaille et intonations à la Jim ou William, hausse le rythme. Il est difficile de résister. A la tentation, de pousser le son. Au désir, de prolonger le plaisir. Alors She’s on the way, d’un allant qui fait la décision, se vêt de motifs de synthés qui ajoutent à l’impact noisy de la chanson. LB GooDsoN, de plus, n’en dit jamais trop. Ses plages prennent fin quand tout a été exprimé. La logorrhée, c’est pour ceux qui veulent combler un manque ou un creux.
Photo@Laurent Methot
Sur ce disque éponyme, rien de tout ça. Tout est accompli, sans excès préjudiciable. J’y entends, quand se présente The meaning, une louche de Wedding Present. Autant vous le dire, évoquer le groupe de David Gedge mène à l’irréductible constat: la face A de cette rondelle est d’une perfection insolente. Beuque y met de jolis choeurs, ne reste jamais trop tranquille. Turbulent, vous disais-je…et on ne peut, à l’audition de son I can do it (c’est loin d’être faux) et de ses guitares assassines sur fond de chant gouailleur, que se rendre à l’évidence. C’est du rock, tout en nerf, tout en impact, qu’on n’apercevra pas en tête de gondole à Carrefour.
On attaque alors la B side, notez ma maîtrise de l’Anglais, jouissivement sonné par les cinq pépites débitées. Wish I’d burned in Berlin, d’un trait pop léger et aérien, mais alerte, cold en arrière-plan, calme le jeu mais ne manque pas de chien. Il y a du style, modelé par des années de pratique, chez l’ami Lionel. Il nous prend presque, même, par surprise tant son oeuvre, depuis les prouesses signées Welcome to Julian, se fait dans l’ombre. L’ombre d’un mec qui sait faire, qui n’éprouve nullement le besoin de se retrouver projeté sous une lumière médiatique qui souvent donne le tournis. Non, le navire LB GooDsoN erre au large, loin de tout ce tintamarre. Il produit le sien, savamment troussé.
Ainsi Baby better days, complètement délié, fait dans l’harmonie. Ca fait chuter la tension sans porter atteinte à la valeur. Souvenez-vous donc; sur le Surfing on a T-Bone de qui vous savez, la palette était déjà étirée et on s’en sortait remarquablement bien. Le savoir-faire à perduré, les climats ouvrent leurs ailes; So far gone, d’une délicatesse dont on palperait presque la mélancolie, se fend de notes bluesy, souffle une fumée à travers laquelle des bribes jazzy s’évaporent. On soulignera, en sus, l’apport de Tom Szodrak à la batterie. The killing moon, reprise d’ Echo & the Bunnymen, marie le clair et l’obscur, le fin et l’ombrageux, avec maestria. On est clairement, sur ce second volet derrière lequel point un intérieur rangé, dans une subtilité du meilleur acabit qui puisse être.
Photo@Marie Le Mauff
C’est déjà la fin, Lize pretend ne déroge pas à l’esprit en servant un folk sensible. En deux facettes distinctes et sans que cela ne chamboule le moins du monde son petit monde, LB GooDsoN griffe un disque de haute volée. Il nous prouve par la même occasion que c’est chez les authentiques, ceux qui avancent avec comme atouts premiers la passion et l’intégrité, qu’on déniche les meilleures contenus. Puisse l’épopée durer, s’inscrire dans le temps et nous réjouir les sens de nombreuses fois encore.