Après Laissez passer, précédent album (novembre 2017) d’un contenu blues du désert déjà attractif, les deux frangins des hauteurs de Golan se mettent à délirer au synthé, optent pour une ligne synthétique, donc, plus affirmée, et changent clairement de registre sur ce Migrant Birds dansant, « club » et oriental à souhait. La trame world dépaysante est néanmoins conservée, c’est ici le disco qui prévaut, virevoltant, dès ce Moonlight entraînant qui ouvre les portes de l’établissement où l’on se trémousse. De motifs « de là-bas » en cadences qui sollicitent le corps et dérouilleront les hanches, la paire désormais installée en Suisse, constituée de Hasan Nakhleh (Guitar, Keys & Vocals) et Rami Nakhleh (Drums, Electronics & Vocals), qu’épaule Amer Mdah (Saxophone & Vocals), surprend dans un premier temps, désoriente -il nous manquerait presque, ce blues « du sable » aride et subtil- mais finit, très vite, par gagner les coeurs. On parlera de renouvellement, de rencontre, aussi, avec un synthé dont la fratrie n’a guère été embarrassée au moment d’un user. Là où d’autres auraient sombré dans l’approximation, TootArd fait tournoyer son monde, se pare d’une nouvelle peau musicale, et pourrait bien, à l’avenir, enthousiasmer les foules à l’occasion de ses lives. Emotional twist, qui assied ce genre nouveau, regorge d’ailleurs de notes arabisantes, imaginatives. Open Sesame, jonché de ces mêmes sonorités, convoque les 80’s, les passe au filtre d’un son actuel. Le rendu, de plus est léger, jamais indigeste. Il passe, d’emblée, le cap de l’accoutumance.
Wanderlust, un brin funky, est moins soutenu. Mais l’effet produit est le même. Revigoré, on ne cesse de danser. Trouble Watan, reggae/dub vivace, démontre que les oreilles bien ouvertes de TootArd ingurgitent de belles choses pour, ensuite, en réinjecter la teneur dans leur bouillon sonore et culturel. Pretty woman, mid-tempo sans excès, nous emmène à la moitié de ce Migrant Birds sans que le plaisir retombe. Il faut dire que Hasan et Rami, en termes de gimmicks qui font adhérer, s’y entendent.
Kiss -on est décidément, pour le coup, dans le sentiment-, ne jurera pas. On y trouve les arguments du projet, intacts. Il se pourrait que certains fans de la première heure, abasourdis, prennent leur jambes à leur coup. Mais les plus ouverts, on l’est quand on écoute ce type de groupe, salueront l’effort et l’évolution qu’il illustre. Babe (on ne sort toujours pas du registre « amoureux ») poursuit le trip, électro, euphorisant. Ca manque un peu, peut-être, d’organique, d’envolées où le piquant du premier disque trouverait place. Mais de façon globale, la mue est réussie. Ya ghali, lent et posé, laisse le saxo embarquer l’auditeur. Red sea disco…disco, réactive la machine à danser. On aborde alors la fin de l’ébauche sans dommage, lorsque qu’arrive Stone heap of the wild cat. On y retrouve, avec bonheur, la dynamique de Laissez passer, à laquelle les deux hommes apposent leur récentes trouvailles. Ca fonctionne parfaitement, on en vient ainsi à se dire que le mix des deux tendances donnerait de bien bonnes choses.
C’est, après toutes ces réjouissances, Remote love qui se charge de clôturer la soirée. Il le fait de façon déliée, dans une coolitude avenante et aux confins du psychédélisme. Migrant Birds, sorti chez Glitterbeat et c’est un (bon) signe, voit donc TootArd étonner, s’étonner peut-être même, puis plaire car, adroit et inventif, il se donne ici de nouveaux galons.