Sorti à l’origine en k7 dans les 90’s, puis en 2006 en vinyl, Obéis! d’Ich Bin, combo mystérieux vraisemblablement issu de l’est de la France, est aujourd’hui réédité, de façon à le rendre accessible tant financièrement, l’objet ne se trouvant plus que sur le net et hors de prix, que pour en faire découvrir au plus grand nombre le contenu décalé, qu’on qualifiera d’ « EBM narquoise et goguenarde. Bref, outre cette nouvelle idée brevetée et approuvée de Replica Records, le vinyl est beau, sa pochette magnifiquement « historique », son titre ironique à en jouir et le contenu…quasiment sans égal. Entre grande gamelle punk et dénonciation, dérision et sons foutrement bons (la fantaisie textuelle EBMisée me fait penser, dans un registre différent mais proche dans l’esprit, aux deux brestois de Maman Küsters, belle référence, ou encore aux excellents Infecticide), Ich Bin arrive à être. A.I.N.Z, EBM donc, sans B.M. de nanti parce qu’ici, on fait avec les moyens du bord et c’est pas celui de Chambord, balourde ses saccades agitées, mal fagotées, et en profite pour nous ramener aux goûts implacables de certains. Les sons fusent, on touche à l’indus et Ich Bin, dans son asile musicale, soignera notre psychisme. Body building, proche du corps et loin de l’esprit, conjugue verbe acide et bruits célestes. Bien foutu ce bordel, captivant même. « Génération de ma B++++ », « Génération de mes C+++++++ »; il semblerait de plus que les mecs aient été dotés, à l’époque, dune lucidité qui, aujourd’hui, servirait ceux qui dé-pensent.
Il y a Danger, Ich Bin le clame et le titre sonne l’alerte. Face à la menace, la folie est de mise. Salvatrice même. DANGER…ORDINATEUR!!!! DANGER…AU TRAVAIL!! et j’en passe, le discours du groupe se reçoit encore largement à l’heure actuelle. Sa singularité, en 2020, trouve sa place et, mieux, choquerait dans plus d’une chaumière.
Hypermassacre, joué depuis l’au-delà, ne dit pas mieux; déroute du couple, dérive professionnelle, délitement du lien social, le parcours y est fidèlement retracé. Mortalité due au Nutella, à la 8-8 de chez Aldi, trame EBM spatiale, Match, Carrefour, tout y passe et casque sur la tête, on accueille avec joie les écarts d’Ich Bin. Industrie lourde, indus cheap et minimal, déconne avec ses sons. Je le confirme, Maman Küsters aimerait Ich bin. Le disque pulse, il ne dit pas n’importe quoi et ne va pas n’importe où. Les textes délirent mais valent le coup d’oreille. Methanol, consommations inédites mises à l’honneur, est une ode, enivrante, à l’ivresse. Merci à Replica Records d’exhumer, régulièrement, de telles perles d’irrévérence, d’ailleurs ou d’en France, qui sentent jamais le rance.
Il y a toutefois une fin à toute bonne chose. Ici c’est Traffic d’organes, EBM planante et délirante dans l’échange, qui ferme le clapet clairvoyant d’Ich Bin. Certaines personnes aiment…Ich Bin. J’en suis et je le revendique fièrement, heureux de cette trouvaille hors-champ et qui plus est extrêmement instructive avec sa pochette aux allures de nouvelle France.