The Yokel « from Metz », je les trouvais déjà sublimes en duo, puis en trio, pour les avoir vus sous ces 2 formules il y a de ça 5 ou 6 ans déjà, dans ma ville d’Amiens. Mais là, c’est encore autre chose. L’euphorisante clique messinne, à huit, joue un folk jubilatoire aux airs…de Grand Huit, parsemé de croisés vocaux splendides comme aimaient à le faire nos Bewitched Hands chéris. Y est leur nouvel album et le second, il refile d’emblée sa contagieuse énergie, sa bonne humeur qui contrebalance les thèmes, parfois préoccupants, abordés sur l’opus. De suite, le bien nommé Sublime…sublime tout. Les voix, le panel d’instruments où banjo, mandoline, trompette, guitare, contrebasse, violon et violoncelle s’ébattent dans la joie mais aussi la ferveur. Ce titre introductif est un concentré de bonheur, on en oublie presque que derrière tout ça, la vie suinte le gris. Sa fougue mélodique, imparable, ferait danser les plus réfractaires qui puissent être. On en trouvera d’ailleurs peu; le registre imposé sur Y, varié, met à plat toute velléité de résistance. No & me, trompette champêtre en ornement, joue la carte du folk alerte. Sautillant, exaltant, The Yokel fait des étincelles. Voix féminine sucrée, ensemble énergique et d’un unisson parfois polisson dans sa pureté (Morgon Peak); la recette est parfaite, le groupe y adjoint une pincée de mélodies troussées avec entrain. On succombe, Y est à inscrire dans la liste des disques qui, sans prévenir, sèment leur félicité et communiquent leur éclat. Un médoc sonore, une thérapie bien plus efficiente que la médication réelle.
Du coup on s’enfile toute la boite, celle-ci contient un The devil’s choice fin, taillé dans un folk épuré. Indie-folk, folk-rock, The Yokel n’en a cure; il joue et étale son propre son, conçu avec passion. Dans la vérité, Dead ends poursuit sur cette voie sobre et dénudée, faisant légèrement retomber l’incroyable vigueur de départ. Il n’empêche, le contenu reste de haute tenue. Magnifique et, quand il reprend l’option vigoureuse qui ici prévaut, impossible à endiguer. Deep down, d’une amorce retenue aux chants alliés, se dirige vers une trame vive et pleine de subtilité. L’éclat vocal, le panache instrumental, y sont tout bonnement bluffants.
Departure, leste puis galopant comme un Irlandais sous le crachin de Dublin, déclenchera des rondes endiablées. Le violon y part dans une embardée sans glissière, les voix typées nous y virent illico presto de nos bases confortables. The Yokel t’emmène là où tu n’es pas, ses sons et rythmes ne peuvent, de toute façon, laisser quiconque de marbre. The grave can wait, plein de vie (elle était facile), crache un jus rock survitaminé. Up-tempo, il fera la peau de celui qui, à l’entendre, restera figé. Dancers can’t wait, Vittorio les amènera à retomber dans leur gigue quand retentira son ton sensitif. A l’aise dans tout registre, The Yokel est bien plus efficient qu’un discours de ministre. Jamais sinistre, d’ailleurs, il nous livre ce Come on Y’all ! fédérateur, où choeurs et brillance de l’ornement, chants en contrepoint aussi polissent une impeccable composition. On capitule, l’équipée The Yokel ne compte en ses rangs que des soldats de la note capables de remporter n’importe quel conflit sonore. Le titre braille, rugit dans ses mélodies exaltantes.
Sur la fin, Headbang and shake m’évoque Violent Femmes. Bon point évidemment. Puis il fonce comme un train en retard, marie les voix, renvoie rage et chatoyance tout à la fois. Il y a là un dynamisme, une symbiose, entièrement renversantes. On est sens dessus-dessous, on en a pour nos sous et Y peut bien finir sur une notre tranquille; il nous a, depuis quelques morceaux déjà, ralliés à sa cause. L’éponyme Y justement, finaud, « déplumé », se charge donc de terminer un ouvrage de rage et d’éclat, enthousiasmant au possible. L’étendard The Yokel flotte, bravant le vent de l’Est dont il est issu, en plein mitan de la prairie folk hexagonale.