Trio amienois vraiment pas à la noix, Sycomore revient pour réveiller les morts. Et we want more, Tim Drelon et ses 2 acolytes (Guillaume Destalminil – bass, vocals et Guillaume Maillard – drums), en plus d’être prolifiques au niveau discographique, maîtrisant complètement un registre entre sludge, doom, noise et…Sycomore, qui sur ce Bloodstone saignant explose de toutes parts. Les ayant vus à la Briqueterie dans notre bonne ville, il y a quelques temps, je n’ignorais pas, loin s’en faut, de quoi ils étaient capables. Mais là, c’est le strike. Tout valse dans l’moshpit. Tiens donc, c’est Ben Moritz qui mixe et enregistre, Aurélien Farlet à peint pour sa part la pochette de l’opus et Irwin Leullier a géré l’aspect photographique. La grande famille donc, ici réunie, pour un rendu collectif et performant à souhait. On ne tarde d’ailleurs pas à s’en rendre compte: si les Picards partent d’une introduction (Bloodstone (intro)) à la menace latente, sombre et retenue, Over my shoulders jette le premier pavé, leste, dans la mare. Batterie saccadée, voix démoniaque puis hurlée, guitares au front, guerrières, partent au conflit. Bien armé, Sycomore fera, après les avoir réveillé, des morts. Son arsenal est redoutable. Prêt à en découdre, il dispose de plus pour cela d’un son aux p’tits oignons. Il distribue des gnons, insert quelques mélopées malignes. Les mecs ont tous un parcours fourni et puis bon, on ne partage pas la scène avec Nostromo, Will Haven ou Hangman’s Chair pour rien. On pense aussi à Unsane pour la force noise, en bref seuls de grands noms surgissent lors de l’écoute.
Forever old, qui suit un amorce ayant fait ses preuves, tire une autre flèche entre saccadé et débridé. Une flèche oui, car ces mecs sont des Apaches. De ceux qu’on ne ramène pas à la raison. De plus ils groovent, au son d’un répertoire sans fautes tangibles. Power of romance éclate à son tour, on alterne sans se vautrer entre parties lourdes et accélérations bien placées. C’est asséné avec force et conviction. Avec, par dessus tout ça, l’assurance de ceux qui avancent. Le dit titre, on le notera, s’est retrouvé sur le cd sampler de Rock Hard. Si avec ça t’as pas compris, je ne peux guère t’aider Dédé…
Knight coat, de durée plus étirée, développe un noise pachydermique dont la batterie s’emballe ensuite, à l’unisson avec le reste, pour partir dans une cavalcade effrénée. Le riffing est puissant, on ne fait ni dans la dentelle, ni dans la flanelle mais on fait bien. Fifty-fifty ne concède rien; chant fait de tripes, tempo pesant et salves psyché obscures, brèves, n’imposent aucune trêve. Il y a dans Bloodstone une diversité cohérente, un refus de se cantonner à une seule et même option, qui honore le clan. La déferlante Fireball, rougeoyante et enflammée (elle était facile…), enfonce le clou. La bâtisse est solide, inébranlable. C’est presque une forteresse, ouvragée par des ouvriers métal au vécu porteur. The enemy, pas plus amical que le reste du bazar, annihile toute tentative de résistance. Là encore les grattes partent à l’assaut, la rythmique trace sa route entre lignes droites et chemins de traverse. Quant au chant, doté d’une telle force de frappe, il se hisse, presque, au niveau de certaines références de choix. Une incruste mélodieuse pour le coup, dans les six-cordes rugissantes, fait respirer l’ensemble.
Enfin et puisque toute bonne chose trouve un moment donné son terme, The web surprend de belle manière, en son début, par ses notes dépaysantes. Il allie ensuite mélopées vocales finaudes, plans subtils et embardées brutes pour conclure, de manière fringante, un Bloodstone qui tient la route comme un Firestone. On est au tapis, vaincu par une brouettée de morceaux décisifs qui laissent augurer de sets pour le moins notoires.