Duo angevin unissant Arnaud Fournier (guitare, voix, saxophone, flûte ou encore trompette..) et Hervé Thomas (voix, guitare, basse, clavier, sampler, flûte), Hint fait partie de l’histoire de l’indé français, sorties fabuleuses et novatrices obligent. Née dans les 90’s, dont elle a incontestablement accentué la portée déjà foisonnante en créant un genre unique, la paire voit aujourd’hui Atypeek Music rééditer son Product Topology, sorti à l’origine en 1996 sur Pandemonium Records, dirigé par un Philippe Petit dont on soulignera au passage le boulot phénoménal au sein de sa structure. Consistant en une relecture de certains titres de l’énorme 100 White Puzzle, effort initial des comparses angevins paru lui en 1995, c’est en fait une seconde peau éblouissante, dépaysante à souhait, une seconde vie, que Hint trouve sur ce disque. Musicalement, on ratisse large et sans plus attendre The Hap In Tenebris (There Is No America Mix), indus et post-rock agité s’y accouplant, nous extirpe de notre zone de confort, de ces recoins familiers au point qu’il est bon, parfois, de s’en échapper. La prouesse tenant, en l’occurrence, à complètement transcender les morceaux de départ, à les réinventer tout en en conservant les éléments clés, les gimmicks et arrangements qui, originellement, font leur force et leur impact. De l’impact, ici, il y en a. A revendre. My Second Hand (One Handed Billard Player Mix), trépidant mais aussi cosmique, te transporte là où tu n’as jamais mis ni les pieds, ni les oreilles. On invente, sur ce Product topology, des paysages nouveaux. Le dit titre braille, ses cris sont magnifiés par l’écrin concocté. Si colérique est, parfois, Hint, alors merveilleux est le support de son ire.
Le mémorable Eyes in axis, l’un des « hymnes » du clan mayennais, se voit une première fois transfiguré sous la forme d’un Sorry For Being Late Mix leste, hypnotique, aux effets mentaux non pas traumatiques, mais hautement bénéfiques. Hint, non content de déjà redéfinir les genres, se redéfinit lui-même sans y perdre un gramme d’identité. Mathematician’s Love Letter (Underwater Mix), s’il garde les chants criés, balance un trip-hop émaillé de scories hip-hop enivrant.
Eyes in Axis, décidément plébiscité, resurgit ensuite, relu cette fois sous la forme d’un Diamond is carbon mix. Riffs choc, voix orientalisantes ou samplées, percus tribales, réitération de motifs jouissifs; tout ça s’interpénètre à la perfection, au gré d’une aptitude à se remettre en question qui génère un rendu de haute tenue. Dont 100% White Puzzle (K2 Mix) n’altérera aucunement la valeur, fort de ses sons et voix limite « tibétains » en son début et de ses effluves jazzy tout sauf communes. Au départ confortablement installé, l’auditeur lévite. Il est impossible, on ne s’y essaiera d’ailleurs pas, de décrire ou définir le contenu sans sombrer dans l’à peu près. Il est fait, de toute façon, pour être écouté. Souvent, fort, ici et ailleurs. Notons bien à ce sujet, que c’est Hint lui même qui s’attelle à sa déconstruction, aidé en l’occurrence et sur certaines plages par La Cellule, Lunar Horizon ou son producteur d’alors, Pascal Ianigro.
Foetus In Tenebris (Claustrophobic Mix), d’un indus qui enfile une vêture du bout du monde, d’un trip-hop acidulé, sombrement dansant, déchiré, réalise à son tour un strike dans nos sens. A la fois céleste et mordant (j’y décelerais presque l’influence des Young Gods pour ce dosage entre « cosmisme » et puissance), fait de sons inventifs, c’est un must de plus qui valide l’idée d’Atypeek, spécialisé dans ce type d’initiative, de rééditer l’objet. Lequel trouve sa fin, et comble notre faim, sur la trame d’un Eyes In Axis (Diaphonic Interferences Mix) enfanté dans un psychédélisme sonique dans sa subtilité, répété et obsessionnel, qui achève et met à plat toute tentative de résistance. On y retrouve l’intensité des guitares guerrières, étroitement liée à des vagues aux textures qui, une fois de plus, nous font décoller de nos bases. Pierre angulaire, à l’instar de la discographie du groupe mais aussi de ses « collègues » hexagonaux de l’époque (on citera pour faire court Deity Guns, Drive Blind, Sloy, Les Thugs, Diabologum, Dominic Sonic, Skippies, Portobello Bones et je pourrais en écrire des lignes et des lignes), Product Topology devrait figurer sur l’étagère de tout être prétendument indé et ouvert à l’audace musicale.