Label participatif lancé par une poignée de musiciens nantais, Confiné-e Records a eu l’idée, ingénieuse, de lancer un appel aux groupes ayant composé « sous confinement », qui lui envoient leurs morceaux ensuite sélectionnés dans le cadre d’une compilation…quotidienne, et ouais Etienne! Ni plus ni moins. Celle décrite ici étant logiquement, vu son titre, la seconde et incluant, comme la première et celles à venir, 19 titres originaux. L’initiative, outre le fait d’alléger une période délicate que l’ « abrutisme » de certains ne contribue pas à optimiser, permet la survenue d’une flopée de clans doués. Elle démontre par ailleurs que sous contrainte et en disposant de moyens réduits, on peut créer du superbe. On y trouve de plus de tout, j’ai la « non-surprise » d’y dénicher les Last Night We Killed Pineapple de ma ville, créatifs et décalés, qui nous refilent avec générosité un Laisse-moi danser cold et..dansant, post-punk et finaud, poppy un brin loufoque dans les voix. Nos précieux jeunots avancent, ils sont de plus, ici, magnifiquement entourés. C’est Ian Caulfield qui ouvre la porte, quand bien même on nous demande plutôt, actuellement, de la clore. Son Confinement 2 se base sur un dialogue, intimement lié au quotidien, qui accompagne le piano et ses notes mélancolico-merveilleuses. Mazette putain bordel, qu’est-ce que c’est beau…mais pas le temps de pleurnicher dans mon thé, Dach Tunner balance son En haut, en bas qui penche plutôt, qualitativement, vers le haut. On est dans une électro sombre et underground, minimale et entraînante. Il y intègre une voix nuptiale et c’est parti Martial, on se trémousse toutes lumières éteintes…en évitant l’étreinte! Laisse-moi danser, disait d’ailleurs Last Night We Killed Poneapple. On n’a d’ailleurs pas fini de se remuer la carcasse; Bleu Russe, de son hip-hop à la narration lettrée dans sa crue réalité, nous permet de continuer à onduler au son de son Lauryn Hill chauve. Puis Pardon, sur un Je suis pas beau doux, pop mais de manière tordue, nous soulève dans les airs.
Passé le track des Tueurs d’ananas, Superswell nous replonge dans la nuit, via son Bebz électro-dark pas très éloigné de l’essai de Dach Tunner. Il fait osciller mon crâne, éveille ou plutôt exacerbe les sensations, salvatrices, éprouvées à l’écoute de la compil’. Doum Doum, lui, propage le Virus sur un canevas synthétique vaporeux. A sa suite Abby (feat. Mansasworld) signe Distance. On y est certes astreints mais le morceau, électro une fois encore crépusculaire, dotée de vocaux hip-hop, fédérera à l’arrivée. Tout comme Boreal, avec son SP 404, engendre l’effet « Sieste sonore », apaisant. Alors que Fasme, avec Coucou David et son..électro (si si) virevoltante, entérine la dominante musicale d’un recueil dont la qualité, conséquente, valide entièrement l’idée de Confiné-e Records.
On poursuit donc dans cette veine, le genre étant il est vrai plus aisé à pratiquer dans les conditions actuelles. Jaquarius, armé d’un Cov-2id303 dont l’énergie semble viser à mettre le virus…à distance, se met à son tour en évidence. Stef ZR8, avec un Let’s See cold-punk/indus bien saignant, honore pour sa part une mouvance différente. Ca apporte de la diversité avant qu’on ne renoue, en compagnie de Philtremble et son COVID ACID, avec un climat électro alerte, boucles entêtantes et voix répétée en surplus. Pour, après ça, s’offrir une pop subtile avec Danse avec les Shlags (Habitudes), au spoken word expressif. Que du bon dans la collection que Rock Roll & Remember, d’un No hugs no kisses no hi five jazzy et aérien assez prenant aux notes inspirées, rehausse encore. On ira d’ailleurs jeter une oreille à celle du premièr jour, dont je ne doute pas un seul instant qu’elle livre, elle aussi, son lot de pépites (j’ai d’ailleurs un peu triché avant de tenir ce propos, l’ayant écoutée sans bouder mon plaisir). Les voix traficotées de Gel Coat, le temps de son Do we gel…dégèlent également l’ambiance, rendent nettement plus viable un confinement que les commentaires et spéculations de certain(e)s sur les réseaux sociaux, émaillées de fautes de Français qu’un élève de CP ne ferait pas, tendent à alourdir.
Qu’importe, Php74 réalise un instrumental léger et dépaysant, nommé Bird sing out there. DJ Software fait de même, troussant un 💦💦 qui m’évoque brièvement Liquid Liquid. On trippe sur ses boucles, c’est pourtant l’ensemble qu’il faut ensuite boucler mais Oji nous concocte pour ça un Findinaway électro-pop plutôt songeur, saccadé. On remercie à l’issue Confiné-e Records, qui en plus de réchauffer les coeurs laisse à entendre, et ce de façon journalière, nombre d’artistes notables à qui il donne l’occasion de s’exprimer de manière porteuse et révélatrice.