A traîner sur Bandcamp en quête de sons « psychiatriques », on finir par trouver. Des perles. Psychiatriques. Anna Funk Damage, hébergé par le label italien Marguerite Records, en est. Son If i can change (on préférerait que non, ça pourrait le ramener à la normalité et par conséquent, à une zik moins impactante), dont les six titres naviguent au risque de chavirer entre EBM, cold-wave, indus et psychédélisme tordu, est un must. Andrea Natale, le signataire de l’objet sonore non identifié par ailleurs limité à une sortie en K7 à 50 exemplaires, amorce son besogne par une loufoquerie dubstep-indus au chant pas moins dingue, noyé dans le chaos, spatial, avec derrière lui une pluie de sons pas plus raisonnables (I gotta get away from here). D’abord ça intrigue, au bout de la 2ème écoute ça prend. Totalement. On adhère avec d’autant plus de conviction que Father, cold-indus fort de guitares drues, s’avère être un standard indéterminé, d’un genre hybride et fortement attractif. Une virée dans le psychisme vertueux d’un Anna Funk Damage pour le moins convaincant dans son créneau, éloigné de toute norme établie.
Avec Wear it out, l’EMB prend les commandes du vaisseau. Répétant ses boucles, elle nous gagne. On se surprendrait à danser dans le noir, habité, au son de cet instrumental perlé de sonorités qu’on n’apprend pas à l’école. On termine alors la face A, on aura bientôt à utiliser le stylo pour remettre la bande d’équerre à forces d’écoutes. Survient l’éponyme If i can change, EBM aussi, mais doté d’un chant et cadencé à souhait. Décalé (le chant), forcément. Comme les bruits qui arrosent le titre, qui comme de coutume finissent par nous vriller le cerveau avec pour effet de nous délecter.
Dans le dérangement, sous le joug d’une belle inspiration, Anna Funk Damage touche au but; perturber, défricher, s’insoumettre. Son approche l’amène à un rendu galvanisant, au sein duquel il ne s’agit pas de compter fleurette. Level, avec son chant hurlé, ses sons « encore un coup » entêtants et ses boucles qui défrisent, son obscurité au tourment palpable, est également un effort de tout premier ordre. On acclame et on en réclame, mais ça dure six titres et après ça, rideau!
Avant que celui-ci ne se ferme, on a droit à une régalade psyché, Shapes of come, à califourchon sur les nuages les plus distants, suivant un mid-tempo accrocheur à l’extrême. La voix, songeuse, produit un effet addictif. Le tout sans produit aucun, si ce n’est la matière sonore. Dans ce domaine, Natale réalise un coup de maître, dont on déplorera la faible distribution, tout en la distinguant car le fait est souvent révélateur de solidité dans ce qu’on produit. Avec mention, au passage, à la structure milanaise ayant eu l’idée d’éditer ce If i can change supérieur.