Duo frappadingue et génialement désordonné, The Garden inclut Wyatt & Fletcher Shears, qui viennent d’Orange County et pratiquent un punk-rock aux formes multiples qui peut, sur ce Kiss My Super Bowl Ring sorti chez Epitaph (tout de même..), débuter dans une forme de douceur pour ensuite brailler tous azimuts (Clench To Stay Awake), revenant enfin au climat de départ qui m’évoque le Sonic Youth de Rather Ripped dans ses élans subtils. Ce que la paire réitère sur A struggle, saccadé, percutant et percuté. Le tout en joignant punk-rock, country et effluves psyché. Parce que ces 2 là, sous des aspects foutraques, ont le parfait sens du collage. Ils glissent des motifs synthétiques dans leur bazar étourdissant, se comportent en Beastie Boys des débuts (A sneaky devil), évoluent selon une éthique punk productive, novatrice, et réalisent un vrai carton stylistique. Auteurs d’un live fou, fin 2018, à la Lune des Pirates de ma ville amienoise, ils maîtrisent comme personne l’art d’alterner belles ritournelles et coups de sang qui envoient tout valser (l’éponyme Kiss My Super Bowl Ring). En agités inspirés, ils scandent sur un fond (en apparence) apaisé (A Fool’s Expedition), et délivrent depuis 2011 des sorties dénuées de tout ennui.
C’est donc le cas, on l’aura compris, avec Kiss My Super Bowl Ring. Les frangins usent, aussi, de sons presque mainstream (j’insiste sur le presque car ceux-ci sont malgré tout déviants), adroitement disséminés dans leur ouvrage. AMPM truck louche sur le post-punk mais attention, il ne le joue pas conventionnellement; ce pas le genre de la maison. The Garden y met des touches bluesy, une certaine finesse dans son débraillement. Il fusionne, passionne, et se démarque sans conteste possible.
Plus loin dans le délire, Hit eject me rappelle à nouveau le regretté Adam Yauch et consorts, proches du clan de par leur malaxage sonore audacieux et ingénieux. Hit eject est quasi indus, un peu cold aussi, hip-hop dans le chant, « normal » dans le chant également. On trouve de façon récurrente, chez The Garden, des sons malpolis qui font parfaitement l’affaire. On aura peut-être du mal, au final, à s’y retrouver. Tant mieux, c’est la marque des meilleurs albums. The King Of Cutting Corners fonce, punk et je ne sais quoi d’autre en même temps. Ses incrustes électro démontrent l’habileté des Américains à se parer d’idées décisives. On décèle même, sur le dit titre, un encart psyché/post-punk barré. Puis Lurkin’, hommage à un Mudhoney, livre un hip-hop signé Khalif Jones dans le chant, mâtine d’électro et de sons acidulés.
Lowrider, lui, convoque Ariel Pink. Les « guests » ne sont pas négligeables, loin s’en faut et pour le coup, voix avenante et cris façon black-métal se donnent le change. A l’instar des climats successifs, encore une fois imbriqués avec brio. Voilà un opus de ceux qu’on se rejoue jusqu’à satiété, qui nous envoie même nous faire enc++++ sur son ultime jet sauvage, intitulé Please, Fuck Off. Celui-ci consiste en un essai qu’on pourrait qualifier de no-wave, multi-genres, à la fin donc d’un disque merveilleusement décalé et assez jubilatoire.