Issu des « french californian suburbs », cependant bien de chez nous, This Will Destroy Your Ears fait du bruit. Beaucoup, et bien. Son Clear, enregistré entre autres par Dorian Verdier de chez JC Satan, est un disque batailleur. J’y entends Killing Joke pour le chant, la furia sonore qui s’en dégage aussi. Les 3 mecs et la fille sont DIY en diable, allant jusqu’à créer leur propre studio, nommé pARPAINg, et à investir Le CONTAINER, lieu regroupant un espace de création dédié aux artistes, un atelier de sérigraphie, un lieu d’expérimentation avec les publics et toute une ribambelle de profils qui vont du codeur au traducteur, de la graphiste à l’écrivain, en passant par la spécialiste en modélisations de risques d’ouragans en Atlantique nord. Leur première tournée (Angleterre, mars 2018) s’est faite en Renault Master de 1981, ils ont partagé la scène avec USA Nails, JOHN, Bearfoot Beware ou Black Midi. T’en veux encore, Hector, où as-tu déjà compris à quel point cette clique est vraie?
Ca tombe d’ailleurs bien, leur son l’est tout autant. Kill martell inaugure le pavé, déferlante bien beuglée à l’appui. On s’y calme quelques secondes, mais l’énergie brute préside et c’est, sur le second volet, un fatras noise de tous les diables qui nous est injecté. Et Coffin for two, cold et sec, ne laisse plus planer le doute: on est parti pour frapper un grand coup. Gimmicks forts, mélodies posées entre 2 flammes post-punk, vigueur non jugulée et écarts aux bruits réjouissants font qu’à l’arrivée, on tend les 2 oreilles, prêt à se les faire détruire. Il y a de l’intelligence, du pensé, dans ces flux débridés. Safety fray, effort plus lancinant, plus massif, ouvre encore un peu plus la lorgnette du combo.
C’est du sonique, bien pesé et jamais stupide. Leominster, au mitan du conflit, tire à l’arbalète sur les derniers résistants. On note la tempérance du tout, bien amenée, qui permet à Clear d’aérer sa densité. Godfinger, post-punk impétueux, se hisse sur la même branche élevée que la bande bordelaise nommée plus haut. Il produit ce même bruit jouissif, incoercible et qui nous prend pour cible, nous les aficionados de rock sans courbettes. Le tout en nous réservant quelques tirs noise des plus nourris. Qu’on encaisse sans plier, ou presque, parce ce bouillon là est celui qu’il nous faut. Avec [un]Believers, un peu shoegaze, un brin cold et surtout très crédible, on en reprend un plein godet, Dédé. This Will Destroy Your Ears joue en rang serrés, honore le DIY prôné ici en tous points et nous gratifie d’un foutu bon disque.
Dans celui-ci on met un pincée, infime, de mélancolie. On la place sur le chemin d’élans galopants (Where is my cake, clippé par le groupe et qui m’évoque, une fois de plus, le Killing Joke du génial Jaz Coleman). On te livre un début de titre final posé, pur (Mitte/Seite en clôture), qui se prolonge jusqu’à complètement fermer la porte de ce Clear clair dans ses intentions et probant dans ce qu’il renvoie. Un must de plus, avec le Lonely Walk par exemple, pour faire court et vous inciter à fouiner, à ajouter au rayon des découvertes notables issue du territoire, nombreuses pour peu que l’on se donne la peine de défricher.